Cuba par l’intérieur (2)

Entre Cabo Cruz et Santiago nous avons jeté l’ancre devant deux petits villages, dans de petites baies bien abritées. Nous sommes restés plusieurs jours, sans avoir à faire de formalités (extra!), et avons pu voir la vie à la campagne, par opposition à celle de villes, un peu voire fortement modifiées par le tourisme.

Marea del Portillo est une petite communauté d’agriculteurs pêcheurs, avec 7 ou 8 petites barques sans moteur, a rame et voile

et des cultures très variées, de l’oignon en grands champs pour vendre à l’extérieur,

champ d’oignon, irrigué par aspersion en pleine journée…

tomate, poivron, concombre, banane plantain et fruit, coco, beaucoup de manguiers près des maisons et même de la vigne an palissage.

l’habitat est assez varié, de la maison traditionnelle

à la maison proprette en béton

le fauteuil à bascule, une constante à Cuba !

on a même vu une ou deux belles américaines sous leur abri.

Le moyen de déplacement le plus courant reste… le cheval, monté ou attelé

Notez les rênes en drisse de voilier ! Nous on a donné une drisse au laboureur pour guider ses bœufs.

Beaucoup d’animaux, poules, quelques dindes, chèvres moutons cochons chevaux, un âne et quelques vaches, ou bœufs zébu pour labourer.

Nous avons pu avoir pas mal de légumes et quelques fruits, en échange de vêtements, savon, fil de pêche ou hameçons… Ils nous ont dit que pour eux la nourriture n’était pas un problème, mais tout le reste, si. En ville c’est plutôt l’inverse.

Chivirico c’est plus grand, un petit bourg (pour les citadins ça reste un petit bled paumé), bien propret avec des espaces publics entretenus

Cet homme est très fier de nous présenter son coq de combat (en short, le coq!!!), et pour nous remercier être intéressé à sa passion et de l’avoir photographié, nous a donné fruits et légumes

L’entrée du parking des bus : y’en a pas de la propagande, là ?

le menuisier : voilà d’où viennent ces fauteuils à bascule !

le ferrailleur

le coiffeur… 1 seul client à la fois !

le taxi à cheval

le taxi à molets

Santiago de Cuba, dernière étape dans ce pays, nous accueille dans une marina abritée dans une grande baie fermée. Comme à chaque endroit doté d’une marina (gérée par l’État), on n’a pas le droit de se mettre à l’ancre ailleurs dans la baie.

La marina est assez loin de la ville, et les transports en commun indigents, du coup on doit se déplacer en taxi, c’est un peu cher. On a réussi à faire le plein de la bouteille de gaz, au marché noir à un tarif exorbitant (eux ont une bouteille tous les 20 jours pour 200 pesos soit environ 1 €, ce qu’ils n’utilisent pas est vendu au marché noir assez cher), on a fait faire une lessive au tarif le plus élevé jamais vu, les 3 premiers jours il n’y avait pas d’eau à la marina, on attendait le camion et le retour de électricité … Tout ça pour dire que les marinas à Cuba, c’est très cher pour des services très limités. Mais on voulait voir Santiago, bien sûr, et attendre ici une bonne fenêtre météo pour passer entre Cuba et Haïti vers les Bahamas, passage qui peut être difficile.

La ville est jolie, fondée sur un mélange d’influences espagnoles, voire mauresque avec des balcons fermés par des moucharabieh, et des influences françaises depuis l’arrivée des colons français chassés d’Haïti par la révolution, lesquels sont parfois venus avec leurs esclaves haïtiens !

Santiago est aussi une capitale culturelle, surtout pour la musique, et là on en a bien profité bien qu’on ne soit allé que deux jours en ville.

La musique

Cuba est un pays de musiciens. Alors qu’au Cap Vert, qui a la même passion, nous n’avons malheureusement pas vu grand-chose, cause covid surtout, ici nous avons vu jouer beaucoup de groupes. Un peu à la Havane, dans beaucoup de bars

et certains clubs, mais là c’est une grande ville et il faut être guidé pour aller dans les endroits où ils se produisent, beaucoup à Trinidad mais essentiellement dans les restaus où ils jouent pour les touristes. Avec dans cette ville des clubs de cours de salsa pour les touristes, mais le soir devant une scène en plein air c’est surtout des locaux qui mènent la danse, avec quel talent !

C’est à Santiago qu’on a le mieux apprécié les talents cubains, d’abord à la Casa de las tradiciones, où l’on a assisté à un récital de chansons « du bon vieux temps » par des artistes passionnés, réunis ente eux – nous étions les seuls touristes – et se régalant manifestement de se produire.

A la Casa de la Trova, en pleine journée, on a vu se produire des groupes de « son », un style de musique d’origine rurale dont le représentant le plus connu est Compay Secundo.

Cette jeune fille présente dans le public avec ses copines est venue rejoindre le groupe le temps d’une chanson

l’excellent mais discret guitariste assis joue de la « tres », une guitare plus petite et plus aiguë à six cordes groupées par deux, toujours présente dans ce style de musique

Cette salle du club est toute petite, il n’y a qu’une quinzaine de spectateurs, qui sont d’ailleurs parfois aussi acteurs quand les musiciens distribuent les instruments de percu, ou la guitare ! Le chanteur dialogue avec le public, tout le monde reprend les refrains dans une ambiance extraordinaire et pourtant très simple. A la fin le chapeau passe pour les musiciens.

Nous avons aussi assisté dans le musée du carnaval à une démonstration de danses pratiquées lors de cet événement, qui a lieu ici fin juillet (après la récolte de la canne à sucre).

Là les influences sont clairement africaines, autant dans la danse que dans l’accompagnement par les seules percussions

Les belles zaméricaines et autres véhicules

Incroyable cette profusion de voitures des années 40 et 50 qui circulent en tous sens dans toute l’île ! Essentiellement des américaines, abandonnées ici quand la révolution a mis dehors leurs propriétaires US. Dans les années 50 La Havane est sous l’emprise américaine, qui y a créé un empire du jeu, de la prostitution de l’alcool et de tout ce qui est illicite dans l’Amérique de ces années. Fidel Castro ayant interdit l’exportation des biens des américains, tout est resté sur place et les cubains s’en sont emparés avec convoitise !

Au départ tout simplement pour s’en servir, puis ils se sont rendu compte que les touristes aimaient ça, donc une partie de ce parc a été entretenu, retapé tant bien que mal, et valorisé en taxis et tours de La Havane

les voitures attendent les touristes pour un tour de ville
avec Gégé et Jean-Pierre sur le Malecon : le rose classe !

on dirait que tous les modèles de toutes les marques sont représentés. Les connaisseurs doivent se régaler et cocher sur leur carnet ! On peut jouer au jeu des 7 marques !

Certaines de ces voitures sont de gros bijoux, d’autres sont bricolées avec ce qu’on peut trouver comme pièces détachées, et ça ne doit pas être simple ! Souvent les gros moteurs américains extrêmement gourmands ont été remplacés par des diesels coréens ! En tous cas elles sont astiquées pour les touristes, très souvent interpellés par les chauffeurs qui vendent leur prestation !

Notre retour de Trinidad à Cienfuegos en taxi s’est effectué en vieille Ford, sans qu’on l’aie demandé.

D’autre part, beaucoup de ces voitures servent tous les jours aux cubains, et on en voit partout, dans des états très variables

bon état

état moyen…

finalement le cheval c’est pas mieux ?

Toujours très photogéniques dans les rues !

Pour la plupart, le remplacement de pièces moteur ou autre doit être une vraie galère, donc on répare comme on peut !

Il n’y a pas que des « belles » mais aussi beaucoup de voitures de John Do (M. Toulemonde) y compris de petites utilitaires.

une Ford populaire, l’équivalent de la coccinelle

En mélange, une très grosse dose de Lada de tous ages, des Moskvitch russes usées jusqu’à l’os, mais aussi des européennes de l’ouest comme cette Saab

la magnifique Moskvitch repeinte et suréquipée de notre chauffeur Yuri

cette Fiat ou des coccinelles VW, on a même vu notre C15 national ! Les Peugeot semblent avoir une certaine cotte, des 404 circulent encore, tandis que beaucoup de taxi sont équipés de la 405. Et bien sûr des japonaises et coréennes, comme dans le monde entier.

Dans la catégorie utilitaires on voit également beaucoup de curiosités

Willis

certains véhicules de transport en commun ressemblent plus à des bétaillères

un transport en commun assez courant. A part en ville, il n’y a pas de bus

des engins d’origine américaine et sans doute russe, ou des véhicules hybrides bricolés à la cubaine !

tracto-voitu-camion

Coté motos c’est pas mal non plus : une invasion de Jawa et de CZ d’Europe de l’Est, déclinées à toutes les sauces, souvent transformées en moto-taxi à trois roues.

Jawa. A noter sur une base de moteur des années 50/60, le frein à disque, le ventilo sur le moteur, le phares longue portée, le fauteuil confort…

Également de valeureux side Dnieppr ou Oural (des copies russes de la BMW)

en arrière plan, la bonne vieille Lada Niva

ainsi que des Suzuki.

La plupart des scooters sont récents et électriques, ce qui élimine une bonne partie des bruits de circulation, mais peine perdue, tous les autres 2 ou 3 roues fument et pétaradent de leurs 2 temps à qui mieux mieux ! Et donc même si la circulation est très fluide, ça reste bruyant ! Sans parler des bus de ville hors d’âge, de véritables ruines !

Ça, c’est pour les quelques artères empruntées, en fait, il y a très peu de voitures, pas d’embouteillages, dans certaines rues de Cienfuegos, on n’entend que les pas des chevaux des charrettes taxi, et sur le célèbre Malecon de La Havane, la 2 x 3 voies se traverse sans aucun problème bien qu’il n’y ait ni feu rouge, ni passages cloutés !

la gare des charrettes

le Malecon
un mix parfait des différents modes de transport !

Cuba : les golfes de Ana Maria et de Guacanayabo

C’est une immense zone de 250 km sur 35 environ, encombrée de hauts fonds et de cayes (cayos = îlots) entre Trinidad et Cabo Cruz, à l’Ouest de Santiago. Elle est bordée au sud par la barrière de corail et un archipel tout en longueur, les Jardins de la Reine, parc national dans lequel il est interdit de jeter l’ancre.

Bien sûr il est impensable de balader là-dedans sans carto précise, mais on a ça, et avec le GPS pour vérifier la position exacte du bateau sur la carte, en surveillant les profondeurs au sondeur, et parfois en essayant de voir les fonds depuis la proue, on s’en sort. Et il y a plein de mouillages possibles à l’abri des cayes, comme celui-ci, avec plus ou moins d’intérêt.

le mouillage sur Algodon. Les parties en jaune ont quasiment disparu, restent quelques bouquets de palétuviers bas et secs, mais l’abri est bon

Malgré tout on a été assez déçus : les îles (toutes désertes) sont toutes quasiment couvertes de mangroves impénétrables, avec seulement quelques plages

le paysage est donc assez monotone, les espaces sont en fait très vastes, l’examen de la carte est trompeur, laissant espérer de petites criques sympas… l’eau est chargée de matière organique donc vert opaque, pour avoir de l’eau plus claire il être à l’extérieur de l’abri, donc exposé, il y a très peu d’oiseaux (quelques pélicans, cormorans, sternes, rares hérons) et les poissons on les voit pas ! Nous avons passé une semaine dans ces golfes, nous arrêtant le soir dans les cayes fournissant un abri correct (le vent soufflait assez la nuit).

Quelques belles ambiances quand même

Cayo Iguana

Cayo iguana : une des seules cayes occupée par un grand palapa pour accueillir des excursions à la journée en super-catamaran, desquels débarquent 40 touristes qui mangent, font trempette et bronzette et jouent avec les iguanes apprivoisés ! Un homme de l’organisation vit sur l’îlot comme gardien, et est content de nous accueillir quand les autres sont repartis.

la même île le soir, nous sommes au mouillage. On dirait pas comme ça mais on est protégés des vagues non pas par l’île mais par les hauts fonds qui nous entourent

Sur la petite plage de Cayo blanco, nous découvrons l’épave d’un bateau squattée par un Balbuzard pêcheur. L’aire est construite sur la plage arrière du navire, et un des adultes n’apprécie pas du tout que nous nous approchions, tandis qu’un jeune oiseau prêt à l’envol exerce ses ailes à côté de l’aire.

l’adulte effectue des vols d’intimidation sur nos têtes

Malheureusement, nous avons fait la traversée contre le vent, essentiellement au moteur, et parfois contre une mer rude, le vent d’Est, même modéré de 15 à 20 nœuds, levant une mer courte et très désagréable. Le vent tombait en général vers midi, la mer se calmant 2 heures plus tard, du coup on arrivait au mouillage avec une mer super calme.

La dernière étape dans ces golfes s’est faite de nuit, car le dernier mouillage n’était pas assez protégé, d’un coup de vent annoncé d’Ouest… (qui n’a pas eu lieu). Alors on est partis pour passer la nuit en mer, dans un secteur bien dégagé de tous ces traîtres hauts fonds. Et comme en milieu de nuit : plus de vent du tout ! on a tout arrêté et on s’est laissé dériver jusqu’au petit matin.

Arrivée à Cabo Cruz

et contrôle des autorités, comme à chaque arrêt ou presque. Ces agents, venus en vieille petite barque à la rame, recopient laborieusement les renseignements demandés par la hiérarchie. Sur un bout de papier qu’on leur a fourni, avec notre stylo…A la fin, ils nous ont demandé un bout de corde pour attacher leur barque , la leur étant prête à rendre l’âme et ils n’avaient manifestement aucun moyen de s’en procurer une autre !

Les bateaux

Ben ici on a pas vu beaucoup de monde ! Quelques voiliers de voyageurs, quelques catas de location et bateaux promène-touriste. A la marina de Cienfuegos, la « meilleure » de toute la côte Sud, on a été 4 voiliers français (dont Yoni et nous), un hollandais et un de Nouvelle Zélande.

Pendant nos navigations sur toute la côte sud de Cuba (700 milles soit env. 1300 km), nous avons croisé un anglais, avec qui nous avons discuté par radio, qui nous a signalé deux voiliers français, Loulou et Imago, que nous avons retrouvé plus tard dans un mouillage. Apéro !

au mouillage à Marea del Portillo avec Loulou

Plus tard nous avons croisé un autre couple sur un mouillage, et à Santiago nous trouvons encore 3 autres bateaux dont 2 qu’on connaissait. Et c’est tout.

Après, nous avons parfois croisé des pêcheurs, sur de vieux bateaux pas encore épave mais pas loin! Construction ferro-ciment pour les gros, ou bois pour de simples barques équipées d’une voile

ces deux-là partaient à la voile dans les îles, pas de moteur, « loin », avec une réserve de glace qui prenait presque toute la place dans la barque. Pour pêcher la langouste. Plusieurs jours et plusieurs nuits sans rien pour s’abriter de le pluie et sans possibilité de s’allonger !

Une voile faite de sacs cousus ensemble, gréée sur des bâtons…

Le retour contre le vent ? À la rame ! Sachant que dans ce golfe, même quand ça souffle pas très fort, ça lève des vagues pénibles !

Tous les pêcheurs veulent nous vendre des langoustes, contre des euros ou du rhum (on en avait pris une réserve!). Normalement ils n’ont pas le droit, mais dans les îles à l’écart des regards indiscrets , ils font ce qu’ils veulent. Quand on a mouillé au Cabo Cruz, où il a un poste de garde-frontières, personne ne s’est approché du bateau !

on a vu aussi de gros bateaux pour la crevette

crevettier et pêcheurs de langouste à l’ancre bord à bord pour la pause de midi
le crevettier déploie ses ailes !

Cuba par l’intérieur (1)

12 janvier, arrivée à Cienfuegos, une des villes intéressantes de Cuba dotée d’une marina dans un grand lac intérieur. Amarrage au ponton de béton, un peu de formalités et David et Paula, du bateau voisin et ici depuis un moment, nous aident à changer des dollars contre des pesos, fournis par un quidam par là…. hmmmm… c’est légal ? (sûrement pas) c’est risqué ? Ça a pas l’air, tout le monde fait comme ça, dès qu’on met le nez dehors on nous propose de changer. Le dollar est à 110 pesos en banque, dans la rue on nous en donne 160 ! on a même vu des changeurs qui exhibaient une pancarte dans la rue à Trinidad avec le taux de change !

C’est une bonne entrée dans le système économique cubain, complètement exsangue à cause du blocus américain et sans doute… peut-être… du système politico-économique cubain incapable de fournir à ses citoyens un minimum de biens de consommation essentiels (ou seulement courants, ou même superflus !). Résultat, une économie souterraine permanente et portant sur toute sorte de denrées, dont nous, dans la rue, ne voyons qu’une petite partie. En tous cas les magasins « officiels » n’ont presque rien en rayon, ou cher, et payable avec un système de carte de crédit cubaine alimentée en Euros (?!?),

les savons et shampoings sont rares et chers

le rhum (ron) par contre… le Havana club le moins cher est à 10 USD le litre, soit presque un 1/2 mois de salaire d’un cubain…

pour ce qui manque les gens se débrouillent et payent en dollars dans des filières obscures. Toujours est-il que les plus malins sont avides de dollars et d’euros auprès des touristes !

Cienfuegos est une jolie ville, fondée par un français en 1819 sur une base espagnole. Pas envahie par les touristes, assez tranquille.

Nous apprenons ici la complexité de la vie à la cubaine : où trouver du pain, les boulangeries sont dévalisées très tôt le matin et il faut trouver des revendeurs dans la rue, ou dans un café, avec de la chance… Où trouver du sel ? Du sucre ? Impossible. Pour les fruits et légumes : un marché municipal quasi vide, quelques roulottes dans la rue,

le marché municipal

qui ont 2 ou 3 produits, jamais les mêmes, sauf les trucs très courants (oignons), un autre marché trouvé le lundi avec 3 marchands mais plus qu’un le mardi, pas d’épiceries, sauf quelques magasins d’État réservés aux locaux munis de leurs tickets de distribution alimentaire, et devant lesquels il y a toujours la queue,

pour avoir accès à ces magasins, il faut détenir une carte d’alimentation

si on cherche quelque chose il faut demander dans la rue et on vous répond que peut-être là mais pas sûr, « parce qu’ici c’est compliqué ! » Ils y a aussi de toutes petites échoppes avec 5 ou 10 produits, il faut mettre le nez dedans et voir, demander.

quelques légumes à gauche, boucherie à droite

En général il y a quand même une pancarte avec la liste de ce qu’on peut acheter et le prix. Bref faire ses courses est un casse-tête, et il faut retenir les endroits où l’on trouve un produit pour y revenir…

A Cienfuegos nous commençons à découvrir la vie cubaine, avec les références omniprésentes à Fidel Castro, au Che et à la révolution (achevé en 1959)

les trombines de Fidel Castro et de Che Guevara sont partout, dans une moindre mesure celle de Raul frère de Fidel
« le cavalier sans peur et sans reproche »

Il y a aussi beaucoup de maximes, de pensées, de slogans sur les murs, sur des pancartes dans la rue

« chaque homme est un travailleur et meurt bien s’il meurt en travaillant »… Super….. Jose Marti est un théoricien de la révolution qui fonda le Parti révolutionnaire cubain en 1892, depuis les États Unis. C’est une figure majeure de l’histoire cubaine, sa statue est partout !
« la liberté et son entretien quotidien on la couleur du sang et sont emplis de sacrifices »
plus cool : »la culture est la première chose à défendre »
dans les locaux du Parti : il n’y en a que pour Fidel ! Le Mouvement du 26 juillet a été créé en 1955 par Castro pour réunir les révolutionnaires

mais bon, il n’y a pas que ça, loin de là !

La vie quotidienne dans les transports

le bicitaxi
la mototaxi : ici une Jawa, avec son moteur des années 50 mais améliorée par un ventilo spécial Cuba, frein à disque, phares longue portée, saute-vent ! Et siège de voiture
un transport assez utilisé à Cienfuegos, par les locaux

les achats, les relations avec les touristes : on est quand même souvent sollicités, pour différentes choses : les devises, du savon, les bici-taxi et moto-taxi, des médicaments, un peu de mendicité, les vendeurs de souvenirs dans les endroits les plus touristiques. L’accroche est très souvent : « de quel pays vous êtes – de France » et hop quelques mots de français. Mais certaines personnes sont contentes de parler avec des français, au moins à Cienfuegos et à Trinidad, où l’influence française a été importante.

Avec Yoni nous organisons une virée à La Havane. Les bus c’est assez compliqué, il faut réserver à l’avance, c’est quand même un peu cher, le taxi collectif est la solution la plus pratique pour 4, après avoir réservé un AirB&B, ce service marche très bien ici, sauf que le site internet est bloqué (pourquoi ???), il faut charger un générateur de fausse adresse IP, toute une histoire (pour nous).

Mais il y a plein de logements chez l’habitant (casa particular) entre 10 et 25 € (ou plus) la nuit, très corrects.

Et nous découvrons la Havane, la capitale (2 ,1 millions d’hab) chargée d’une lourde histoire hispano- américano-révolutionnaire ! Un choc d’entrée : dans le centre, un nombre impressionnant d’immeubles tombent littéralement en ruine, alors même que certains étages sont encore habités

Il est sans doute dangereux de passer ou de stationner dessous, mais ce n’est pas interdit !
ici sur le Malecon, l’avenue en bord de mer la plus populaire et la plus touristique !

d’autres juste à coté sont en bon état abritant des commerces ou des restos, d’autres sont juste mal entretenus avec peintures et boiseries défraîchis ou lépreux, ou encore bardés d’échafaudages et d’étais… Tout cela intimement mélangé et vivant.

exemple d’immeuble restauré au premier niveau pour un restau, et bricolé dans les étages pour des appartements, voyez la taille des gens au balcon par rapport à la taille des niveaux ! ils ont donc été dédoublés

L’autre chose frappante, encore plus qu’à Cienfuegos : le musée de l’automobile vivant ! On voit de tout à partir des années 40/50, et de tous les pays. Cela mérite un article à part, mais on a parfois l’impression de se balader dans un décors de film des 50′, d’autant que la circulation est souvent peu dense, comparée à celle de nos villes surchargées !

ce n’est pas une rue piétonne mais la circulation n’est pas chargée !

Autre surprise : il y a des églises partout ! Eh non, les méchants révolutionnaires ne les ont pas détruites !

la catedral, XVIIIème

Certaines parties de la vieille ville ont été bien restaurées avec les fonds internationaux car la vieille ville a été classée par l’Unesco patrimoine de l’humanité

mais du coup on se croirait dans n’importe quelle ville.

Un exemple de bel immeuble représentatif de cette ville :

Nous avons passé trois jours à flâner dans les rues le nez en l’air, à écouter les musiciens dans les bars, à faire les touristes, quoi ! L’impression que nous laisse cette ville est très mitigée, tant de questions se posent quand aux difficultés de vivre des gens, dans un pays dans lequel la révolution socialiste a voulu tout régler sans manifestement y arriver… Circuler à charrette à cheval n’est pas dramatique (la transition énergétique à portée de main!) mais devoir faire la queue devant les magasins dès qu’ils son approvisionnés …

les queues ici sont bien organisées : les gens ne sont pas rangés en ligne mais celui qui arrive demande qui est le dernier arrivé (ultimo ? ), le mémorise et va discuter ou faire autre chose. Ça a l’air de bien fonctionner !

MAIS… ce qui est vrai pour le petit peuple ne l’est pas pour l’hôtellerie et la restauration : ici on ne manque de rien, et on se croirait dans n’importe quel autre pays… par exemple on trouve difficilement du sucre dans le commerce mais il y en a sur les tables dans les cafés !

Et il n’en reste pas moins que Cuba est une dictature, parti unique et pas de presse indépendante !

Trinidad

Les Yoni repartis vers d’autres rivages (peut-être les recroiserons nous aux Bahamas?), nous partons en taxi pour Trinidad, une des plus belles ville de Cuba, qui a tiré sa richesse de la canne à sucre et du travail des esclaves, jusqu’au milieu du XVIIIème. Nous logeons dans l’annexe d’une ancienne maison coloniale, proche du centre. Comme très souvent, le rez-de-chaussée a été transformé en restau ou en magasin de souvenirs,

les grilles plus ou moins ouvragées sont systématiques, même aux balcons des immeubles plus récents style HLM. Parfois on ne rentre même pas dans le magasin, l’achat se fait à travers la grille, la porte-fenêtre fait la même dimension. Mais si l’on peut entrer, on découvre alors d’immenses pièces très hautes, des cours intérieures, sur lesquelles donnent les pièces du haut. Ou parfois en passant dans la rue devant la maison, les immenses fenêtres grandes ouvertes donnent sur le salon

la gamine fait ses devoirs… quasi dans la rue

A Trinidad la plupart des maisons sont à un niveau, seuls les « palais » en ont deux, très rarement plus, et ont souvent été restaurés et transformés en musée.

le museo romantico, qui illustre le faste des palais des très riches au XVIIIème siècle, qui ont importé d’Europe tout ce qui se faisait de plus beau ! Vingt esclaves pour tenir la maison…

le palais vu de la place Jose Marti

Dans le centre historique (classé par l’Unesco) beaucoup des maisons bourgeoises de cette époque appartiennent encore aux descendants, qui les entretiennent d’autant mieux quelles sont devenues des restaus, des magasins de souvenirs, avec en plus des chambres à louer, ce qui était le cas chez nos hôtes Karen & Rique.

Mais la ville au quotidien des habitants de Trinidad est plutôt illustré par cette vue, et les américaines sont hors de portée des petites bourses !

ce petit paysan vient vendre ses quelques productions dans la rue

Et la campagne ? Il y a un beau massif de moyenne montagne à côté de Trinidad, le massif de l’Escambray, mais nous n’avons pas trouvé à y loger pour randonner dedans. Nous nous sommes rabattus sur une sortie à la journée organisée pour groupes. L’intérieur du massif échappe à l’aridité des plaines, en saison sèche actuellement, et les collines sont bien vertes, les cascades coulent, c’est la grande attraction touristique,

Ce que nous avons vu de la forêt n’a pas l’exubérance des forêts tropicales humides du continent, sauf un peu ici en atmosphère confinée de ravin. Cela faisait plus penser aux laurisylves de Madère ou des Canaries.

On a même bien observé le Tocororo, l’oiseau national car de couleurs nationales, bleu blanc rouge ! C’est un trogon, comme le quetzal au Guatemala.

De Cienfuegos, on est partis aussi vers la montagne, en taxi (qui chauffait dans les côtes, il fallait s’arrêter pour laisser refroidir), pour visiter d’autres cascades.

Cela donne également l’occasion de traverser la campagne, les villages

où l’on voit les cultures, l’élevage, les ruches, et où l’on se demande encore une fois pourquoi Cuba n’est pas autosuffisant en nourriture… Beaucoup de traction animale, cheval et un peu de bœufs.

Arrivée à Cuba

On savait que la traversée de Isla Mujeres vers Cuba n’était pas facile. Sur la foi d’informations à priori fiables (mais il est très difficile d’avoir des infos sur tout ce qui touche Cuba), nous avons visé le Cabo San Antonio pour faire nos formalités à Los Morros, le poste le plus à l’ouest du pays, cap Est-nord est, avec un vent de sud-est, de travers en théorie, mais avec le courant portant au nord, le début du Golf Stream parait-il. En fait à peine à 25 milles de la côte, le courant nous a pris vers le nord, sans qu’on arrive à le contrer ! On a du faire du moteur pendant une bonne partie de la traversée (durée totale 25 heures) et on n’a remis les voiles qu’à 6 heures du mat, avec un courant faible, un vent raisonnable et une mer assagie. Bon. On arrive à Los Morros, 2 maisons, un quai… On se met à quai à coté d’une lancha de pêcheurs,

le quai à las Morros. Devant : la lancha des pêcheurs. Dans nos haubans : le pavillon de courtoisie de Cuba, et le pavillon jaune ou pavillon Q, indiquant qu’on a pas fait les formalités.

et arrive un officier… qui nous annonce que le poste est fermé pour cause de réparations ! Sacrée déception, on ne peut même pas rester à quai, la « marina » étant elle même fermée ! On doit donc repasser le cabo San Antonio et partir pour Cayo Largo à 200 milles de là, un des autres ports d’entrée. Notre route pour Cuba est la côte sud, protégée des coups de vents du nord qui arrivent régulièrement en hiver. En attendant on va se mettre au mouillage et se reposer dans une baie entourée de mangrove, très protégée, très calme ! Ouaaaah ça ne bouge plus !

On va mettre cinq jours pour joindre Cayo Largo, en s’arrêtant presque tous les soirs, dans des coins tranquilles, sans descendre à terre parce qu’on arrivait tard au mouillage, mais on a quand même profité de beaux couchers de soleil, avec ou sans rayon vert !

La route suivie, sinueuse, nous a fait passer entre les cayos, qui sont des îles couvertes de mangrove dans les eaux peu profondes (3 à 8 m), à l’intérieur de la barrière de corail, sachant qu’à l’extérieur on atteint très vite des profondeurs jusqu’à 4000 m. !

Cayo Largo : aucun intérêt, c’est une île à touristes façon Cuba : accueil dans des hôtels sur la plage, infrastructures bien léchées et organisées autour d’un tourisme aseptisé, mais arrosé de rhum cubain (le mojito fait rage!) et nourri de langouste au resto.

la Marina Marlin à Cayo largo

La petite marina (d’État) est vide de voyageurs en voilier, seuls quelques catamarans y restent, proposant des sorties à la journée vers les cayos, baignade bronzette snorkeling et homard sous le palapa de la plage. Nous ne restons que le temps des formalités, assez simples et rapides, une fois passée l’inspection des services sanitaires, qui cherchent littéralement la petite bête : inspection des paquets de pâtes et de riz, du contenu du frigidaire, des boites de conserve (date de péremption?) etc. Mais ils ont été cool et n’ont pas tout inspecté, on a en fait à bord une épicerie complète achetée au Mexique et répartie dans de nombreux coffres, sachant qu’on ne trouve pas grand chose à Cuba.

Au total l’entrée à Cuba nous coûte 290 USD, visa pour 3 mois.

Deux français nous abordent au ponton : c’est vous Nocciolino ? Ils nous donnent des nouvelles de nos amis Gégé et Jean-Pierre, sur Yoni, ils sont partis d’ici ce matin vers Cienfuegos, on les a loupé de peu ! On se connaît depuis le Cap Vert, on les a recroisés au Guatemala, on se retrouvera à Cienfuegos.

En fait on les rattrape à Cayo Guano del Este, dernier mouillage avant Cienfuegos

Au mouillage avec les pêcheurs, le phare remarquable de Cayo Guano del Este, marquant le début d’un archipel de cayos

Guatemala Mexique, quelques aventures maritimes

350 milles (env. 650 km) entre la sortie du Rio dulce et Isla mujeres, à coté de Cancun, Mexique, en longeant la côte. Mais sur cette portion, on remonte le vent qui est majoritairement Est ou pire, Nord-est, et notre cap c’est Nord-est… contre le vent ! Après s’être pris deux grains un peu violents, et compte tenu que notre bateau n’aime pas taper les vagues quand on remonte le vent, et que nous même n’aimons pas non plus et nous fatiguons vite, on a décidé de s’arrêter tous les soirs pour passer la nuit dans un des nombreux mouillages tout le long de la côte. Ce n’est pas possible sur toutes les côtes, alors profitons en ! Résultat, on a mis 10 jours pour cette nav, mais on a pu se reposer tous les soirs et découvrir de beaux coins

Plusieurs arrêts au Belize, mais sans faire de formalités administratives, pays cher, compliqué et n’aimant accueillir que les touristes friqués. Mais pays qui recèle, comme d’autres dans les Caraïbes, de beaux spots de plongée sur les récifs de corail tout le long de la côte ou sur des îlots entourés d’une barrière de corail. On peut y rentrer en bateau, en surveillant bien la carte et le sondeur… Mais sur la carte c’est impressionnant, en vrai le paysage c’est… de l’eau partout, la barrière de corail est toujours invisible, mais très peu profonde, entraînant moult naufrages !

le Banco Chinchorro au Mexique : le plus grand atoll corallien de l’hémisphère nord, 45 km de long pour 14 de large. Le petit liseré vert autour du bleu, c’est la barrière de corail, en bleu les eaux de moins de 5 m de profondeur, en jaune la terre émergée : au centre une île de 5 km de long, au nord 2 îlots.

Nous avons atteint le nord du banc où un mouillage est recommandé au bout d’une longue journée de 13 heures. Il fallait partir au point du jour pour sortir du lagon de San Pedro (Belize) par une passe étroite, et remonter le vent tantôt à la voile tantôt aidés par le moteur quand le vent était trop de face, malgré cela nous sommes arrivés après la tombée de la nuit, entrés dans la passe de nuit (à ne jamais faire !!!) et mouillé derrière la barrière de corail, qui empêche la houle du large (et d’Est) de passer.




en fait la carto est très précise avec des courbes de niveau de profondeur tous les 0,5 m., mais à prendre avec beaucoup de prudence quand on avance avec moins d’un mètre sous le bateau ! Notre mouillage c’est le symbole ancre sur fond orange

Normalement il y avait des bouées de mouillage, pas trouvées, et le matin on a vu qu’elles n’existaient plus.

les eaux turquoise dans l’atoll

Nous avons pratiqué des mouillages derrière des îlots très bas et couverts de mangrove, ce n’est pas un paysage extraordinaire mais c’est bien abrité. Dans deux d’entre eux , des pêcheurs sont venus également passer la nuit, à 8 ou 10 dans de très petites embarcations sans cabine, juste abrités sous une bâche…

L’avant dernier jour de notre périple, nous quittons notre abri derrière une mangrove dans l’immense baie de l’Ascension, partiellement fermée par une barrière de corail. Hier nous avons eu le plaisir de voir passer une spatule rose, un grand échassier local. Nous partons de nuit, prévoyant une navigation un peu longue malgré une prévision météo plutôt favorable, vent du Sud-est de 20 nœuds. Mais 60 milles quand même pour aller mouiller devant San Miguel, capitale de l’île de Cozumel. Dès la sortie de la lagune, on voit que l’état de la mer est très détérioré : super agitée, même si les vagues ne font pas plus de 2 mètres, c’est court et dans tous les sens ! Le bon vent de travers nous fait quand même avancer vite, anormalement vite : nous bénéficions d’un courant favorable, de l’ordre de 2 nœuds, si bien que nous filons à 7 nœuds dans cette lessiveuse géante ! Nos prévisions sont de 5 nœuds, ce qui fait un bonne différence ! Et de fait à 12h30 nous commençons à passer sous le vent de l’île de Cozumel, la mer se calme, le vent faiblit mais le courant nous pousse toujours. Et surprise en arrivant : aux quais devant la petite ville, 3… non 5 paquebots ! Plus deux autres plus loin : SEPT au total, dont 3 géants !

alors que pendant tout le trajet nous n’avons quasiment pas vu de voilier, ni de cargo, et quasiment pas de petits pêcheurs. Et presque pas d’oiseaux marins… Le désert !

Et le lendemain, toujours aidés par un bon courant, cette fois avec un vent modéré et une mer modérément calme, nous filons (avec des pointes à 9 nœuds grâce au courant!) vers Isla mujeres pour terminer cette croisière pas de tout repos, 440 milles en zig zag dans les Caraïbes occidentales.

Prochain épisode : le Yucatan !

Le Guatemala par l’intérieur

Le retour de Babeth le 5 septembre marque la fin (provisoire!) des travaux et le début des visites à l’intérieur du pays.

Les sites archéologiques mayas

Nous en avons visité quatre, dont le réputé Tikal, dans le nord du pays, et Copan, au Honduras, juste de l’autre coté de la frontière. Tikal : un site immense, où se côtoient des temples entièrement mis à jour et d’autres non dégagés, enfouis dans la végétation, repérables à leur forme pyramidale. Le tout étroitement intégré dans la forêt tropicale, sous laquelle serpentent des sentiers aménagés. Les plus grands temples émergent de la canopée,

permettant d’évaluer l’immensité, soulignant l’impression de mystère qui se dégage de ces constructions. Les plus grands font plus de 60 m de hauteur, mais il y en a de toutes taille, ainsi que des palais, des aires de jeux, des stèles sculptées, des autels.

Ces vestiges de la civilisation maya (de 2000 avant JC. à l’arrivée des espagnols en 1524) sont très nombreux et loin d’être tous mis à jour, de même que de nombreuses questions se posent encore.

Tikal
Tikal
Yaxha

On sait quand même qu’à cette époque, dans les années 600 à 800 de notre ère, les connaissances astrologiques étaient assez élaborées. Toutes leurs croyances mystiques étaient reliées au cosmos – relations des humains avec la Terre, les astres. Certains « temples » ne seraient que des observatoires astrologiques. Un système de représentation et d’écriture par pétroglyphes, signes gravés sur la pierre, est encore visible sur certains temples et sur des stèles parfois bien conservées

Quirigua
Quirigua
Quirigua
Quirigua

A Copan au Honduras, de nombreuses habitations de nobles ainsi que les temples sont très ornementés de sculptures époustouflantes, retraçant la vie des dieux, des rois, et les croyances

l’escalier des hiéroglyphes : toutes les contremarches de cet escalier sont sculptées, ainsi que les rampes, et relatent l’histoire de la maison royale de Copan

les stèles en particulier sont surchargées de symboles, qu’on retrouve à différents endroits, et qui demandent une connaissance approfondie de cette civilisation pour en faciliter la lecture. Sans guide (livre bien documenté ou guide officiel du site), on n’y voit qu’une prouesse de sculpteur.

L’ara rouge était l’oiseau sacré chez les mayas à Copan, au Honduras, comme le quetzal au Guatémala.

Les aras, soigneusement protégés et nourris sur le site

représentation de l’ara sur un palais

Les monuments et maisons des nobles étaient colorées, en particulier avec le rouge de la cochenille.

Les rites mayas, toujours vivants, sont encore pratiqués dans certains sites archéologiques, dans les cimetières catholiques et dans des endroits sacrés en milieu naturel (sommets de montagnes, bords de lac…).

Un guide imposé que nous avons suivi sur le site de Yachka nous a bien expliqué les croyances, le calendrier, le système d’écriture des nombres, que nous sommes incapables de retranscrire ici (cf. wikipedia!),

coucher de soleil au sommet d’une pyramide

Juste à coté, sur la cime d’un arbre à hauteur de nos yeux, une famille de singes hurleurs s’apprête à passer la nuit.

Les moyens de déplacement

Comme dans tous les pays pauvres, les gens se déplacent beaucoup à pied, mais aussi à moto (quasi que des 125 cc), qui peuvent porter jusqu’à 4 personnes, tandis que les riches se payent des voitures, enfin, souvent des pick-up qui servent à tout. Nous n’avons quasi jamais vu de gens sur des mulets ou chevaux comme moyen de déplacement, hormis les ganaderos quand ils s’occupent du bétail.

Les transports en commun sont très utilisés : à commencer par le tuktuk,

tuktuk « normal »

très populaire, pas cher (pour nous), présent partout en ville. Dans certaines villes la déco des tuktuk est très sophistiquée, il y a même des magasins spécialisés !

tuktuk amélioré
tuktuk artistique
à l’intérieur

Dans les campagnes le pick-up sert de transport en commun, sans siège dans la benne !

Le microbus est utilisé entre les villes, il part quand il est (presque) plein, s’arrête sur un signe pour prendre de nouveaux passagers. C’est un fourgon 9 places chez nous, mais ici il y a 15 places assises, et on en rentre encore plus s’il faut ! Plus le chauffeur et un aide qui reste debout à la porte latérale pour héler le client tant qu’on a pas quitté la ville.

Photo intérieur bus : même principe de remplissage dans un bus un peu plus grand.

Plus grand, le chicken bus,

ces bus scolaires étasuniens à la « retraite », retapés et surtout souvent super décorés pour une longue seconde carrière. Ils ont un moteur puissant et des chauffeurs très pressés qui font hurler le moteur et malmènent la boite de vitesse autant que les passagers ! Mais qu’ils sont beaux !

Il y a aussi quelques grandes compagnies de bus qui relient les grandes villes seulement, avec parfois des bus modernes très confortables, mais qui vieillissent vite et peuvent devenir très inconfortables !

Et sur l’eau ? La lancha, pardi !

San Pedro
le parking du supermarché à Fronteras

Costumes, marchés, langue

Sauf dans les grandes villes, la population guatémaltèque est majoritairement maya, et une grande majorité des femmes maya et des petites filles portent quotidiennement le costume traditionnel. Et c’est un enchantement permanent que de les côtoyer en tous lieux. Par contre chez les hommes c’est beaucoup plus rare.

à San Juan
à Santiago Atitlan
à Santiago Atitlan
à San Juan

Les éléments permanents sont la jupe (corte), large et plissée ou droite maintenue par une ceinture large qui sert aussi à ranger le smartphone (!), la tunique (huipile), et parfois une coiffe.

à Nebaj

Broderie sur tissage, fait à la maison ou par des artisans, à la main ou à la machine à coudre, peut-être parfois sur des tissages industriels (mais dans les magasins c’est toujours « hecho a mano »!).

Les couleurs, les motifs des broderies, sont caractéristiques d’une région, d’une ville (il parait que les premiers colons espagnols aient imposé cette différenciation pour distinguer les populations) . Mais toujours c’est une explosion de couleurs mêlées, en général bien assorties. Et nous avons remarqué que dans la grande majorité, ces vêtements sont propres, parfois un peu défraîchis.

Chaque ville, village a de nombreux magasins où l’on peut acheter ces vêtements, sans compter les marchés, où là, c’est la débauche de tissus et fils pour les broderies ! Incroyable le stock sur les étagères !!!

au marché à Chichi
au marché à Chichi

Un des grands marchés du Guatemala, à Chichicastenango, est réputé et conseillé dans les guides touristiques, mais la foule compacte est surtout composée des habitants du « canton », en proportion il y a peu de touristes blancs. Une partie des gens vendent, soit dans des emplacements permanents du marché couvert (de tôles ondulées), aux allées étroites et très fréquentées, soit dans des étals montés pour la journée dans les rues environnantes, il y a encore les commerçants locaux qui sortent leur marchandise sur le trottoir, et les ambulants qui vendent de tout, un peu

à Santiago Atitlan

l’autre partie flâne, négocie, achète. Un certain nombre de stands vendent de la nourriture, que ce soit des vrais petits restos (comedors) dans les espaces couverts, avec tables et frigos pour les boissons, ou les occasionnels chez qui on peut acheter des choses plus ou moins cuisinées à manger debout dans la bousculade !

à Chichi

les tortillas de maïs faites et cuites sur place. Le maïs est la nourriture de base des mayas, « hommes de maïs »

Dans certaines villes il y a une halle pour le marché aux fruits et légumes, sinon c’est dans les rues, plus ou moins couvertes

à Chichi
Uspantan

Dans les marchés, dans la rue, dans les transports, on n’entend pas que de l’espagnol, la langue officielle ! Il y a 23 langues autochtones, et dans les campagne profondes, une bonne proportion des mayas ne parlent pas ou peu l’espagnol. Un guide à Santiago Atitlan, un secteur pourtant touristique mais depuis peu, nous a affirmé que 75 % de la population de sa ville ne parlait pas espagnol, en le justifiant par une faible fréquentation de l’école, qui coûte cher et qui empêche les enfants d’aider au labeur familial ! Ces langues étant très différentes les unes des autres, cela n’a pas aidé à la résistance des indiens à la colonisation, aux répressions, aux discriminations… Il nous a fait une démonstration de prononciation comprenant des bruits de gorge, inimitable !

Armes

La possession voire le port d’armes sont ici très courants dans les régions à majorité ladinos : on voit très souvent des gardes privés armés de sorte de fusils à pompe, déjà à la marina,

Marcelino, le garde de la marina

mais aussi pour protéger les entrées de banques, les camions de livraison, voire aux stations d’essence. De temps en temps on voit des types avec un pistolet bien visible à la ceinture, le summum a été au Rio Dulce, lors d’un défilé festif de ganaderos, l’équivalent du cow-boy, dont nombreux étaient armés, un pistolet à chargeur rallongé d’un coté de la ceinture, et une batterie de chargeurs de rechange de l’autre coté !

le garde du corps escorte la famille du chef à leur emplacement réservé au rodéo sur taureaux !

Une des très rares femmes armées, mais d’un pistolet rose !

L’usage de ces armes est suffisamment courant pour trouver ce genre d’avertissement à l’accès à la plage

« uso de armas blancas y de fuego… »

Fête des cerf volants

Le 1er novembre, fête des morts, donne lieu dans certains endroits à un festival de cerfs-volants très populaire. Nous nous sommes rendus à celui du village de Sumpango, près d’Antigua, qui a lieu non dans le cimetière comme souvent, mais dans un grand terrain au sommet d’une colline.

Là, des milliers de gens viennent des alentours encourager les équipes qui fabriquent de grandes fresques en papiers peints ou collés, qui sont préparées à l’avance mais montées sur une structure de bambous et dressées ce jour-là

« à l’origine censés représenter le lien avec les âmes des défunts qui parlent à travers le souffle du vent, les cerfs-volants sont aujourd’hui vénérés comme une source de réconfort aux souffrances de la vie » . Les thèmes abordés sont souvent le respect des anciens, de la nature, des valeurs fondamentales de la culture.

Et c’est la queue pour se prendre en photo devant les œuvres

Les plus grands (jusqu’à 11 m de diamètre) ne volent pas, mais ils essayent d’en faire voler de plus modestes (autour de 2 m de diamètre), il n’y avait pas assez de vent ce jour là pour que ça marche bien. Par contre les enfants s’essayent avec des modèles plus légers.

Au milieu du terrain s’est également déroulé un rite maya, sur une tombe « exportée » du cimetière (normalement cette fête se passe dans les cimetières)

préparation du bûcher par les shamanes, beaucoup de bougies, des cigares, des cônes d’encens..

Et tout autour du terrain, des dizaines de comedores, petits restaurants populaires qui proposent grillages et tortillas !

Architecture, villes, peintures murales

Comme souvent, l’intérêt des villes est lié à leur passé colonial, qui a laissé quelques beaux restes avec les églises et couvents (dont beaucoup ont été détruits par des tremblements de terre), ainsi que les bâtiments administratifs, souvent répartis autour de la place centrale

Antigua, autour de la place centrale
Antigua
Antigua

Les maisons étaient basses en général mais ont tendance à prendre des étages, en particulier pour des hôtels. Le béton et la tôle ondulée sont partout, même si on voit encore quelques toits en tuile canal.

Le rez de chaussée est parfois peint de couleurs vives, et les peintures murales sont très fréquentes

Il y a souvent une place centrale avec plus ou moins d’espaces verte arborés, des bancs, des marchands ambulants, où il est sympa de rester à regarder les gens !

en général le marché est tout contre, avec toujours assez d’animation.

La plus belle ville que nous ayons vue est Antigua, l’ancienne capitale du pays, qui a été presque entièrement détruite par un tremblement de terre en 1773. A la suite de quoi les autorités décidèrent de déplacer la capitale, et d’abandonner le site. Malgré cela au siècle suivant la ville se reconstruit, restaure l’architecture coloniale, la ville devient même monument national en 1944. Patatras en 1976, nouveau séisme dramatique qui fit des milliers de victimes, et des dégâts considérables. En 1979, le classement Unesco permet encore une fois à la ville de renaître ! Mais certains sites ruinés restent en l’état, comme une partie des couvents

Antigua est très touristique, donc pleine d’hôtels, restos et magasins pour touristes, mais plutôt de bel artisanat (vêtements traditionnels et objets divers) ou d’artisanat d’art (bijoux, créations sur base de tissus traditionnels…)

Arco de Santa Catalina, le monument le plus photographié du Guatemala ? Le volcan Agua, au fond

Et toujours au loin l’un trois des volcans qui entourent la ville, dont le Fuego, toujours actif, qui pète toutes les 10 mn !

le Fuego lâche un prout ! (pris depuis l’hotel)

Le quetzal

C’est l’oiseau emblème du Guatemala, un oiseau magnifique de la famille des trogons (Pharomachrus mocinno), de la taille d’une pie, aux couleurs vives et doté d’une très longue queue en traîne.

photo issue d’une expo sur la place centrale consacrée au quetzal et à la forêt humide

Il vit dans la forêt tropicale humide de montagne en Amérique centrale, mais cette espèce est classée « quasi menacée » du fait du morcellement de son habitat.

Photo prise du Biotopo del quetzal : plantation de café et autres cultures sous bâches noires

Nous en avons vu dans son milieu naturel (mais la photo n’est pas très bonne) au biotop du quetzal, et après on en voit en illustration partout, en tant qu’emblème national, à commencer par les pièces et billets, car c’est aussi le nom de la monnaie nationale ! C’était une espèce sacrée pour les mayas et les aztèques, qui ont utilisé les longues plumes de leur queue pour leurs parures.

donc on le voit et on en entend parler tout le temps !

Non loin du biotop du quetzal se trouve Semuc Champey : à cet endroit la rivière disparaît sous terre et les ruisseaux tombant des berges escarpées et couvertes de forêt tropicale, forment une succession de bassins calcaires aux eaux turquoises.

Magique en début de journée mais il y a fort à parier que ce milieu fragile ne résistera pas longtemps à la horde de touristes qui viennent s’y baigner dès le milieu de la matinée !

Religions

La religion catholique est, sans doute pour peu de temps encore, majoritaire au Guatemala. Mais pour pouvoir s’implanter, les missionnaires ont du s’adapter aux croyances ancestrales. Résultat, un savoureux mélange de rites animistes et chamaniques.

Nous nous sommes baladés dans l’intérieur du pays au moment de la Toussaint, et les festivités durent plus d’une semaine ;

A Antigua nous avons assisté à une procession classique qui a duré plusieurs heures et c’est terminé par des pétards, feu d’artifice et un toro de fuego

Nous avons remarqué qu’il n’y avait aucun mayas parmi les porteurs qui se sont succédé

A Santiago Atitlan nous avons eu l’honneur de rendre visite à Maximon (pour les ladinos) ou Rilaj Maam (pour les Mayas) probable amalgame entre dieux mayas et le Judas de l’évangile. Il change de maison chaque année et est gardé par des chamanes qui en échange de quelques quétzales implorent sa protection pour vous !

Maximon change de tenue chaque jour.

Dans la pièce à coté se trouve la femme de Maximom

Avec ses jolies baskets et sa clope

A San Juan Atitlan nous déambulons dans les rues à la nuit tombée. Attirés par une musique enjouée, nous franchissons un large portail. En fait il s’agit du cimetière ! Des femmes déposent multitude de fleurs et bougies sur les tombes tandis que quelques hommes écoutent un orchestre de Marimba installé au milieu des tombes. L’un deux tient dans ses bras un tableau représentant un couple (ses parents ?). Bien que morts, ils ont aussi le droit de profiter de la musique !

Vidéo de l’orchestre au cimetière ici

Chichicastenango :

Sur le parvis de l’église Santo Tomas, que l’on atteint par une vingtaine de marches (les grands escaliers de nombreuses églises anciennes font référence à ceux menant au sommet des pyramides mayas), des chefs de prière appelés chuchkajaues (« mères-pères ») agitent des encensoirs fabriqués dans des boites de conserve percées en psalmodiant des incantations.

Tandis que de l’autre coté de la place, dans la petite église Capilla del Calvario, les fidèles déposent des bougies sur les dalles de pierre noircie.

Au cimetière, très coloré comme tous ceux que nous avons vus au Guatemala, plusieurs endroits sont réservés aux rites mayas, souvent couvert à cause de la pluie fréquente.

A cet endroit, il y avait 3 grands feux dans lesquels les gens versaient des cannettes de coca ou de bière.

Dans les montagnes et parmi les communautés les plus pauvres, différentes églises évangéliques ont fait une percée foudroyante. Leurs nombreux petits temples rutilants contrastent avec l’habitat rudimentaire au milieu duquel ils sont implantés.

Ces sectes issues des États-Unis et financées par les sièges nord-américains, disposent de moyens considérables pour prêcher dans les écoles et stations de radio et TV qu’elles financent.

A Nebaj, au cœur d’une région pauvre qui a particulièrement souffert pendant la guerre civile, nous avons eu la surprise de trouver en face de l’église, un centre commercial flambant neuf.

La place
et son centre commercial

Qui peut bien financer de telles infrastructures ? La réponse est peut-être dans les wc publics !

L’envers du décor

Au début du 16ème siècle, les Espagnols réduisirent les peuples indigènes en esclavage en les obligeant à cultiver leurs propres terres au profit des colons.

La société coloniale était très hiérarchisée. Les Espagnols nés en Europe détenaient le pouvoir, les criollos (Espagnols nés au Guatemala ) méprisaient les ladinos (métis espagnols – mayas) qui à leur tour exploitaient les Indios maya.

En 1821, les criollos se révoltèrent et l’indépendance du Guatemala fut proclamée. L’indépendance profita aux criollos mais aggrava le sort des Mayas qui, bien que légalement libres, demeuraient asservis aux grands propriétaires terriens.

S’ensuivit une succession de dictateurs qui favorisèrent les intérêts nord-américains. Le Guatemala était (est ?) une république bananière avec, entre autres, l’implantation de la United Fruit Corporation, immense empire fruitier nord-américain qui occupa une place dominante dans la politique nationale.

En 1944, un mouvement insurrectionnel renversa le gouvernement et établit la démocratie. Le nouveau gouvernement mena une politique de réduction des inégalités sociales et lança une réforme agraire visant à morceler les grandes propriétés et redistribuer les terres en friche de la United Fruit au profit des paysans afin de favoriser les culture vivrières. En 1954, un coup d’état organisé par la CIA renversa le gouvernement, les réformes sociales ne verront jamais le jour et les terres expropriés seront rendus aux gros propriétaires.

Gouvernements conservateurs et pouvoirs militaires vont ensuite se succéder avec l’appui des États-Unis. La main mise de l’économie au profit d’une infime minorité et la violence extrême des répressions policières et militaires envers une population qui, au départ, ne fait que réclamer pacifiquement un minimum de droits, provoquent la formation, au début des années 1960, d’une guérilla de gauche. La dictature militaire, bien équipée et conseillée par les États-Unis, lança ses armées sur la population rurale, principalement maya. Le conflit pris fin en 1996. Ce que certains ont appelé le génocide Maya aura fait 200 000 morts, des dizaines de milliers de disparus et plus d’un million de déplacés (sur une population de 17 millions). La Commission pour l’éclaircissement historique mise en place après les accords de paix avec la guérilla, attribue 93 % de ces violences aux troupes gouvernementales, 3 % aux guérilleros et 4 % à des acteurs non identifiés.

Les plaies de la guerre civile sont encore à vif dans les territoires mayas. En témoignent les modestes mémoriaux présents dans chaque ville.

Santiago Atitlan
Chichicastenango
San Cristobal Vrapaz
Nebaj

Et maintenant ?

Les multinationales et grands propriétaires poursuivent l’accaparement des terres, encouragés par le gouvernement. Dans les plaines fertiles on retrouve le modèle agro-industriel basé sur la monoculture d’exportation (bananiers, hévéas, palmiers à huile mais aussi fraises sous serres (dégueux!) ananas… Modèle hautement toxique pour les hommes (emplois saisonniers mal payés) et l’environnement (mais Bayer est partie-prenante de la Chambre d’agriculture locale !…). United Fruit Company s’appelle maintenant Chiquita, histoire de se donner une nouvelle image de marque mais les pratiques changent peu !

Bananerais autour du site maya de Quirigua

Les cultures vivrières des petits paysans sont reléguées aux flancs abrupts des montagnes, entraînant déforestation et glissements de terrain.

Les ladinos (métis) qui vivent principalement dans les villes, tirent leur épingle du jeu car ils possèdent la majorité de la richesse du pays (terres, commerces, emplois) tandis que les indigènes, qui représentent environ 50% de la population sont les laissés pour compte d’un des pays les plus pauvres de l’Amérique latine : 60 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté et plus de 22 % de l’extrême pauvreté. Ce sont essentiellement les communautés paysannes et autochtones qui sont touchées. La malnutrition infantile touche 48 % des moins de 5 ans.

Corruption généralisée, très fortes inégalités, importance du secteur économique informel ( 76 % de l’emploi total en 2019) qui ne génère pas de ressources pour l’État, violences liées au gangs (les fameux maras!) et au trafic de drogue, à tout cela s’ajoutent les risques naturels (tremblements de terre, éruptions volcaniques, cyclones, glissements de terrain ) : le Guatemala n’est malheureusement pas un cas isolé !!!

Guatemalan Achi women, victims of sexual violence during the internal armed conflict (1960-1996), react at the end of the trial against five former Guatemalan Civil Patrol (PAC) members, outside the Justice Palace in Guatemala on January 24, 2022. Five former Guatemalan paramilitaries were sentenced Monday by a court to 30 years in prison for sexual violence committed against indigenous women in the municipality of Rabinal in the 1980s during the civil war (1960-1996). (Photo by Johan ORDONEZ / AFP)

La condition des femmes au Guatemala n’est guère reluisante : la violence envers les femmes est très répandue et le taux de féminicide est en hausse régulière. Pendant la guerre civile, l’armée s’en est pris particulièrement aux femmes, utilisant leur corps comme arme de guerre pour détruire le tissu communautaire ; ces viols et crimes atroces sont restés impunis. Il a fallu attendre 2022 pour que cinq ex-paramilitaires soient condamnés pour viols de femmes autochtones pendant la guerre civile.

Ces femmes qui ont été attaquées dans leur identité de femmes et d’autochtones se raccrochent à la défense de cette identité, notamment à travers le port des vêtements traditionnels ( très peu portés par les hommes ) et le respect des coutumes et pratiques mayas.

Ce sont les femmes que nous avons vu s’organiser en coopératives pour vendre leur production artisanale ou leurs plantes médicinales… Elles sont largement présentes dans les diverses luttes de communautés autochtones contre des projets miniers ou hydro-électriques .

3 décembre : nous allons quitter le Guatemala, au bout de six mois. Bonne immersion dans ce beau pays d’Amérique centrale ! Malgré la chaleur (sauf lors de nos incursions en montagne), le moustique (d’après Babeth il y en aurait plusieurs), et le bateau qui moisi en vert ou en noir, il faut nettoyer régulièrement !, on a bien profité. Nous avons fait de belles rencontres à la marina, son gérant français Gwendal et sa petite famille guatémaltèque, les voiliers Nissos et Voilovent avec qui nous avons fait des virées avec leur voiture, et des gens locaux ou pas ; notre incapacité à parler espagnol nous handicape malheureusement trop pour avoir de vraies relations avec les locaux, on le regrettera toujours, car ils ont le contact facile, sont très gentils, toujours prêts à aider !

Direction la pointe nord-est du Yucatan au Mexique à partir de lundi.

Et quelques photos en rab du Guatemala ! :Photos

Guatemalalala

Attends, pour en arriver là, on a d’abord quitté la côte du Panama pour relier l’île de San Andres proche du Nicaragua mais appartenant à la Colombie. En fait c’est là qu’on avait prévu d’effectuer nos formalités de sortie du pays. 250 milles au nord ouest, donc, près de 50 heures de navigation avec pas trop de vent.

San Andres est une petite île très touristique, son aéroport fonctionne à plein régime ! On ne voulais pas s’attarder mais les prévisions météo un peu inquiétantes pour un secteur dit peu commode à traverser nous y ont bloqués une semaine. Juste quelques photos pour cette île, d’un intérêt moyen (pour nous)

A part les touristes tout le monde se déplace en moto
l’une des attractions touristiques de l’île

Enfin nous levons l’ancre, les inquiétudes météorologiques levées. En fait nous avons eu très peu de vent, on a réussi à avancer grâce au spi (grande voile légère de petit temps) et parfois au moteur, avec des records de lenteur ! Au bout de 5 jours et 520 milles, on s’arrête au passage d’une des îles au nord du Honduras, juste histoire de se poser un peu. Mais sans descendre à terre, on n’a pas de papiers pour ce pays (et on a plutôt pas envie d’avoir plus de problèmes administratifs). Là aussi très touristique, avec présence de 2 paquebots…

Puis encore une trentaine d’heures en mer pour enfin mouiller devant Livingston, port d’entrée du Guatemala. Ce n’est d’ailleurs pas un port mais un village sur la côte. Pas accessible à tout le monde, puisque les eaux sont peu profondes à l’estuaire du Rio Dulce, de l’ordre de 1,50 m, nous avec nos 1,35 m de tirant d’eau on passe !

Aucune route ne dessert ce village, toutes les liaisons se font en lancha et c’est le cas sur toute la longueur du rio jusqu’à Frontera à 36 km de l’embouchure. Là on croise la grande route qui mène à Guatemala, la capitale, et qui enjambe le rio par un grand pont de 26 m de haut. Pourquoi si haut ? Aucun gros navire ne vient jusqu’ici, en tous cas les voiliers passent dessous sans problème, pour aller sur le lac Izabal qui est de l’autre coté.

Donc avec Nocciolino nous remontons le Rio Dulce, par des gorges genre gorges de la Truyère, pour les lozériens, mais avec de la forêt tropicale sur les pentes !

Il y a des habitations le long du fleuve, peu nombreuses tant que les pentes sont raides. Après la partie gorges on rejoint une large plaine et on traverse un lac bordé de mangrove (palétuviers), avec, relativement bien cachées, des habitations aux toits de palmes sur pilotis. Dans l’un des endroits qui deviendra mon mouillage préféré, une crique très fermée et très protégée, et très jolie

Cayo Quemado, avec quelque maisons mayas, sans le toit traditionnel celles ci !
la maison d’un « étranger », avec son bateau.

il y a aussi des voyageurs en voilier qui ont réussi à acheter un terrain (façon de parler, c’est inondé!) et se sont fixés là, alternant séjour ici et en Europe ou aux USA. Parmi eux, Fred, qui vend ses services en électricité/électronique de bord, et qui trouve la panne de notre AIS et répare le sondeur – super !

Quelques photo de l’ambiance de ces lieux, qu’on parcoure en annexe

des orchidées fixées sur les arbres
des sortes de trèfles d’eau, assez répandus, qui avec les nénuphars, forment un plan végétal flottant
le jacana, très commun, est doté de très longs doigts lui permettant de se déplacer sur les feuilles flottantes
les mayas se déplacent à la pagaie sur de petites pirogues ou sur de plus grands lanchas à moteur
le morpho, grand papillon assez commun, une vraie merveille quand il se déplace le long des canaux entre ombre et lumière

A Frontera ce n’est pas la même ambiance : c’est une grosse bourgade centre commerciale du secteur, bâtie le long de la route de la capitale, avec en parallèle une façade lacustre pleine de pontons pour les lanchas des habitants des lacs. L’étroite rue accueille plein de commerces mais aussi un gros trafic routier pleins de gros camions, qui bien que roulant au pas, aiment bien faire Broum Broum !

coté Rio Dulce, le petit marché aux poissons
toujours coté rio, les pontons et le trafic de lanchas, dont une partie sont des taxis

C’est toujours très animé et très bruyant ! En plus des magasins (dont un nombre impressionnant est lié à la téléphonie!), il y a plein de vendeurs ambulants, qui arpentent la rue dans un sens puis dans l’autre. La circulation est constante, gênée par l’étroitesse de la rue et les piétons, qui n’ont d’ailleurs pas de trottoirs !

Le secteur de Frontera est aussi un lieu très connu des voyageurs en voilier, car très protégé des cyclones qui frappent les Caraïbes. Il y a donc ici plein de petites marinas et de chantiers où laisser son bateau ou faire de réparations, avec beaucoup d’artisans, et surtout des tarifs très attractifs !

Le 20 juin, Babeth repart pour la France, bus jusqu’à Guatemala ciudad, puis vol pour Mexico et Paris. Je reste sur le bateau, avec un programme de petits travaux et d’entretien. De plus les violentes pluies d’orage mettent en évidence des fuites à différents endroits, c’est l’occasion de retravailler sur l’étanchéité ! Et faut pas croire que ça m’amuse…

pour trouver les fuites, il faut démonter les parois, l’isolant…

Mais ma principale préoccupation est quand même de chercher les bons spots sur le lac ! Là, je fais une sortie en annexe assez tôt matin avant la chaleur, et une en fin d’aprème sauf si orage. Mais les orages sont plutôt nocturnes, ce qui ne facilite pas le sommeil.

passage entre les palétuviers, aux racines mi aériennes mi aquatiques
une tortue d’eau douce, pas encore identifiée
la talève violacée, souvent sur les nénuphars
les petits canaux partant du lac mènent souvent à des parcelles ouvertes pâturées par des zébus ou des chevaux

Et de temps en temps, il faut revenir à la ville pour le ravitaillement ou pour acheter du matériel.

les femmes mayas en tenue traditionnelle

Une première série de photos ici

Chez les indiens Kuna, peuple de la mer

Les Kuna ont acquis une réelle autonomie sur un grand territoire de la côte caribéenne du Panama : une bande côtière d’environ 180 km de long, avec toutes les îles coté mer et les premières collines. Interdisant toute construction ou industrialisation, ainsi que toute exploitation minière, il n’y a aucune route sur leur territoire (à ce niveau, il n’y a d’ailleurs pas de route reliant l’Amérique du nord à l’Amérique du sud). Ils ont conservé un mode de vie de pêcheurs cueilleurs agriculteurs assez proche de ce qu’on aurait pu observer il y a 2 ou 300 ans, les concessions au modernisme restant limitées. Ainsi la majorité des embarcations que nous voyons sont de petites pirogues creusées dans un tronc et dirigées à la pagaie, parfois à la voile,

mais ils ont quand même des moteurs, en particulier pour les transports entre les villages.

Un excellent article décrit l’histoire, les coutumes et les rapports au monde de cette étonnante communauté. Voir ici. Nous l’avons bien étudié avant de venir.

Nous abordons la côte panaméenne en traversant le golfe Darien après une navigation sous vent très faible, et contraire ! Des vitesses entre 2,5 et 3,5 nœuds, de rares pointes à 4 nœuds ! Ah, on a eu le temps de voir le paysage, qui d’ailleurs était vide d’oiseaux, de poissons ou d’autres bateaux ! Et la nuit, on est passé dans une grosse zone orageuse, et craignant de violents coups de vent, on a affalé les voiles et passé au moteur. La crainte sous ces orages, c’est la foudre qui pourrait occasionner la destruction de tout ou partie de l’électronique ou du circuit électrique.

A l’arrivée, une côte montagneuse et boisée, ourlée de nuages (on aborde la saison humide). Nous passons entre les îles et la côte, et nous voyons les premiers villages, de maisons de palmes sur des îlots très bas.

Nous posons l’ancre devant l’île de Pinos, où vivent 200 à 250 personnes. La fin d’après midi nous pensions avoir la visite du secrétaire du Sahila (chef du village) pour prélever l’impuesto, le droit au mouillage. Mais, personne. Le lendemain matin nous débarquons sur notre annexe toute neuve, et on déambule dans les ruelles sableuses du village, salués et hélés par les nombreux enfants, ravis de voir des étrangers. Les adultes sont réservés, répondent à nos saluts mais sans engager le contact. Les maisons sont de bambou et de palme, parfois avec quelques matériaux modernes.

Elles sont quasiment toujours entourées d’une palissade de bambous, plus ou moins perméable.

Quand on passe le long d’une maison on peut être hélé par une personne invisible, mais qui a vu passer les étrangers et veut discuter. Discussions en bribes d’espagnol, pour nous, parfois en anglais, avec, quand ils apprennent qu’on est français, un « comment allez vous » ! Eux parlent kuna et apprennent l’espagnol dans les écoles qui sont bilingues.

Après avoir réglé notre taxe de mouillage (10 $) nous nous arrêtons dans les mini épiceries, ça permet de parler un peu et aussi d’acheter des petits pains faits à la gazinière.

Le surlendemain nous quittons Pinos pour Ustupu, un gros village cette fois, qui occupe toute l’île. Le secrétaire du chef du village encaisse notre taxe et nous informe qu’ici nous pouvons nous promener et prendre des photos librement. Très forte densité de population, des enfants partout. Des écoles partout. Touts les bâtiments scolaires et les centres de soins sont en dur, financés par l’État.

Si les hommes sont habillés de façon banale, short et T-shirt + casquette, la plupart des femmes portent la tenue traditionnelle très colorée et ouvragée

dont les pièces maîtresse sont le mola, rectangles de tissu brodé rajouté à un bustier, et le winnie, sorte de construction en colliers de perles qui ornent les mollets et les avants bras. Depuis l’ouverture très progressive de cette société au tourisme, les molas deviennent une production artisanale de premier ordre

Cette vendeuse et ses filles nous présente fièrement ce tableau en appliqué de tissus. Les molas sont suspendus au dessus

Nous en avons acheté plusieurs, de l’ordre de 10 à 20 $ pièce selon la complexité de l’ouvrage.

Cette tenue est portée même pour aller travailler aux plantations ou pour les taches de la journée.

Les enfants, à l’école, portent un uniforme : pantalon long noir avec ceinture, chemise blanche et souliers pour les garçons, jupe bleue, chemisier blanc et soquettes montantes pour les filles ! Mais dans certaines îles on a vu des tenues traditionnelles simples pour les filles. Et en dehors de l’école, ils sont habillés comme tous les enfants !

Et nous retrouvons, avec les enfants, le contact très facile, tous nous disent bonjour. Les plus grands, jusqu’à l’adolescence, engagent facilement le contact, en espagnol ou avec quelques mots d’anglais.

Les prises de vue posent problème dans cette communauté : sur certaines îles elles sont interdites, ou soumises à une rétribution, sur d’autres elles sont libres, mais pour les personnes, il faut demander l’autorisation, et nous avons vu que ce n’est pas toujours accepté.

Les villages sont tous implantés sur des îlots de faible surface et entièrement occupés, avec juste la place pour quelque arbres, quelques places publiques dont celle réservée à la statue des héros de la révolution de 1925, qui leur a apporté l’autonomie.

à Ustupu, statue de Nélé Kantulé, un des leaders de la révolution

Chaque famille a un petit terrain entouré d’une palissade, à chaque fois qu’une fille se marie et que le couple s’installe dans la famille de la fille, on construit une nouvelle hutte. mais bien sûr le terrain n’est pas extensible, l’île non plus…! Donc au fur à mesure des mariages, et des naissances, la densité augmente.

On pousse la palissade pour une nouvelle construction

Pourtant nous n’avons pas vu de nouvelles implantations sur des îles voisines, ni sur le continent qui est complètement inoccupé, sauf quelques exceptions : terrain de foot, aérodrome…

Sur le continent, chaque famille a également un terrain dans les collines pour les cultures : le monte. Et dans la journée c’est un va et vient de pirogues, la plupart traditionnelles et sans moteur, entre le village et la terre pour rapporter les produits du terrain, mais aussi des matériaux : bois, sable, pierres, bambous et palmes.

Au passage, certains nous proposent des mangues, des cocos, des avocats etc, plus rarement du poissons, une fois des langoustines. On leur achète avec quelques dollars ou balboas, la monnaie panaméenne alignée sur le dollar US.

A Ustupu on a rencontré le facteur de pirogues. C’est simple : tu vas dans la forêt au « monte » (la montagne), tu coupes un arbre (certains ont une tronçonneuse, les autres à la hache), tu le rapportes au village et tu le creuses.

Nous passons ainsi de village en village, avec chaque fois de nouvelles rencontres, à terre ou au bateau. A Playon Chico, Arrnalpeïa est venue en pirogue avec ses enfants pour nous proposer des molas. On en a déjà acheté pas mal mais on se laisse tenter, de plus elle est sympa et se laisse photographier.

On prend rendez vous dans l’après midi pour qu’elle fasse un petit winnie à Babeth, les parures de perles que les femmes mariées portent sur l’avant bras et le mollet. Nous sommes reçus dans la famille, qui compte 20 personnes sur 3 générations.

Eux ont la chance d’être implantés au bord de l’eau, parce qu’au milieu du village ils sont plutôt les uns sur les autres, dans un dédale de ruelles très étroites.

Dans le village, c’est assez propre, mais les abords le sont beaucoup moins. Depuis toujours ils ont eu l’habitude de tout jeter à l’eau, mais depuis l’apparition de matières non dégradables, ça se gâte !

Il faut combattre le monstre Plastick !

Quelques dizaines de mètres séparent ces deux endroits ! Manifestement il y a une prise de conscience de l’urgence de traiter les déchets, mais le mal est fait. Les abords immédiats du village sont parfois un cloaque malodorant, et les petites îles inhabitées alentours sont couvertes de plastiques en tout genre… Malgré leur résistance, les Kuna se laissent quand même gagner par le rouleau compresseur du monde moderne et tous ses défauts : téléphonie, motorisation, consommation d’énergie… Le gouvernement du Panama finance une partie des infrastructures, écoles, centres de soins, aérodromes, ponts entre certaines îles, panneau solaire et batterie pour chaque famille… Même s’il y a une gros décalage entre le mode de vie kuna et celui des pays voisins, qui certes vivent dans la démesure (comparons les puissances des moteurs des petits bateaux : 3×300 CV pour des embarcations de loisirs contre 75 CV maxi pour les embarcations de transport de personnes ici, sur des bateaux sans cabine qui desservent les îles, et quasi tout le reste à la pagaie!), même si la simplicité est resté un mode de vie normal, même si l’on voit beaucoup d’activités collectives entre les habitants (sport co et autre), le smartphone gagne, on a vu les ados jouer dessus, toutes les micro épiceries vendent des sucreries et sodas aux fruits sans un gramme de fruit, le tourisme et ses perversions progresse. Une partie des jeunes part s’installer et travailler au Panama ou ailleurs et contribue à faire changer le monde kuna. L’autorité morale du village, le Sahila, édicte des règles qui régulent le mode de vie.

Dans chaque village il y a un congresso, grand bâtiment ou l’on se réunit pour traiter des affaires du village : le Sahila et ses assistants sont dans des hamacs au milieu de l’assemblée.

Selon son degré d’ouverture ou de traditionalisme, de modernisme ou de conservatisme, la vie peut être assez différente d’un village à l’autre, et l’accueil du voyageur n’est pas le même. Un bon exemple en est le degré de liberté pour prendre des photos. Mais les Sahilas n’empêcheront pas la petite société kuna de se transformer, moins vite que chez les voisins mais inexorablement, semble-t-il. Le déferlement de la « société plastic » et l’incapacité à gérer ce problème n’est qu’un exemple.

Un matin arrive la pirogue d’Armando, il vient nous demander de l’aider à réparer son harpon dont l’élastique (genre fusil de pêche) vient de lâcher, lui gâchant sa journée. On lui répare, tout en discutant. Sa pirogue a 30 ans, elle prend pas mal l’eau, il faut écoper sans arrêt ! Sa voile aurait besoin de nouveaux rapiéçages, on lui donne du fil (on n’a pas de tissu d’avance). Lui a 64 ans, toujours vaillant !

Après une semaine à passer de village en village en suivant le littoral, nous arrivons dans les San Blas proprement dites, avec des groupes d’îles répartis plus au large. Au contraire de ce que nous avons visité jusqu’à maintenant, c’est un secteur touristique : beaucoup de voiliers, dont sans doute une partie de charters, de petits établissements avec huttes d’hébergement et restos, alimentés par des lanchas à moteur qui amènent leur cargaison de touristes (panaméens ou autres, on a pas vu de près) à la journée de plage/cocotiers/langouste/baignade en eau turquoise.

Ces îles ne sont pas occupées par des villages mais certaines par des familles plus isolées qui vivent de la pêche

Ces pêcheurs font le tour des voiliers au mouillage pour proposer des langoustes, souvent trop petites.

… et quand même de la vente de quelques produits d’artisanat, molas, bracelets, et même pavillon de courtoisie kuna !

Nous sommes moins intéressés par cette partie du pays kuna, et … déjà fin mai ! Le lundi 23 nous partons donc vers le nord et entamons un long trajet éloigné des côtes, pas trop sûres, mais passant par des îles au large : la première : San Andres, Colombie.

Les Kuna, peuple de la mer ? Ils vivent sur des îles très plates, sont dépendants de leurs pirogues pour leur survie. Mais c’est aussi un peuple que la montée des eaux va menacer très vite…

Encore des photos sur le peuple kuna : un clic sur ce lien : « photos »

En route pour les San Blas… bis

Avant d’attaquer la traversée du golfe de Darien qui nous conduira aux San Blas , nous faisons trois étapes sur des petites îles de l’archipel du Rosario, classées «réserve naturelle…»

La première, proche de Carthagène, est blindée de structures touristiques et reçoit les catamarans et autres yacht pour des sorties à la journée. Bruit et fureur, le classique des fêtards des Caraïbes, fuyons !

La deuxième, bien que très touristique, est exempte de bateau à la journée et nous sommes hors saison donc la plupart des structures sont fermées . Nous mouillons et une barque avec moteur vient vers nous. Il y a un risque d’orage pendant le nuit et il propose de nous conduire dans la mangrove ou nous serons en sécurité. Nous le suivons donc pendant une bonne vingtaine de minutes au milieu du dédale des hauts fonds.

l’arrivée dans la mangrove

Arrivés à destination, il nous quitte sans rien demander et nous sommes obligés de la rappeler pour le dédommager de son essence. Ça fait du bien, c’est si rare une aide sans contrepartie !

Un bar sur un micro îlot

La dernière : isla de Fuerte est une sympathique surprise. Éloignée des centres touristiques du continent, elle possède bien quelques hébergements, fermés à notre passage, mais a pour le moment conservé un mode de vie propre aux îles habitués à vivre en relative autarcie .

Une bonne partie de l’île est occupée par de la « permaculture », évidemment pas nommée ainsi, il n’y a qu’en occident qu’on a inventé l’eau chaude !

Il y a aussi des cochons, des zébus, beaucoup d’ânes (petits), des poules et des coqs (avec leur arène pour les combats) et le long d’un étroit sentier qui dessert les cultures une jolie rencontre à hauteur de nos yeux :

l’aï, le paresseux à 3 doigts

L’avantage avec ces bestiaux, c’est que même avec un appareil photo basique, on a tout le temps pour faire la mise au point !

Le petit village est très animé. Après la sieste, certains se retrouvent dans les 3 bars du centre du village (en fait, quelques chaises en plastique devant la tienda où l’on vent de l’alcool). Avec chacun sa sono qui en nombre de décibels n’a rien à envier au pire des concerts de Métal ! Peut-être que l’électrification récente grâce à une centrale solaire flambant neuve leur à donné des ailes.

Dans chaque bar, un type avec une bouteille de rhum ou une bouteille de whisky offre des topettes à tout le monde et nous en fait profiter. On a été raisonnables et peut-être qu’ils ont été un peu déçus ! De toutes façons avec le niveau de la sono, on ne pouvait pas échanger un mot !

Prochaine étape : le comarca de Kuna Yala au Panama, en mode pirate … car nous avons décidé de ne pas faire les formalités de sortie de la Colombie (nous les ferons à San Andres, île Colombienne au large du Nicaragua) et de ne pas se déclarer au Panama. Région autonome du Panama, le territoire des Kunas a ses propres lois et tant que nous resterons sur ce territoire nous n’avons en principe rien à craindre des autorités Panaméennes.

Direction donc les îles les plus proches de la Colombie pour une remontée d’île en île vers le nord ouest dans une région totalement à l’écart des circuits touristiques.