Cuba par l’intérieur (1)

12 janvier, arrivée à Cienfuegos, une des villes intéressantes de Cuba dotée d’une marina dans un grand lac intérieur. Amarrage au ponton de béton, un peu de formalités et David et Paula, du bateau voisin et ici depuis un moment, nous aident à changer des dollars contre des pesos, fournis par un quidam par là…. hmmmm… c’est légal ? (sûrement pas) c’est risqué ? Ça a pas l’air, tout le monde fait comme ça, dès qu’on met le nez dehors on nous propose de changer. Le dollar est à 110 pesos en banque, dans la rue on nous en donne 160 ! on a même vu des changeurs qui exhibaient une pancarte dans la rue à Trinidad avec le taux de change !

C’est une bonne entrée dans le système économique cubain, complètement exsangue à cause du blocus américain et sans doute… peut-être… du système politico-économique cubain incapable de fournir à ses citoyens un minimum de biens de consommation essentiels (ou seulement courants, ou même superflus !). Résultat, une économie souterraine permanente et portant sur toute sorte de denrées, dont nous, dans la rue, ne voyons qu’une petite partie. En tous cas les magasins « officiels » n’ont presque rien en rayon, ou cher, et payable avec un système de carte de crédit cubaine alimentée en Euros (?!?),

les savons et shampoings sont rares et chers

le rhum (ron) par contre… le Havana club le moins cher est à 10 USD le litre, soit presque un 1/2 mois de salaire d’un cubain…

pour ce qui manque les gens se débrouillent et payent en dollars dans des filières obscures. Toujours est-il que les plus malins sont avides de dollars et d’euros auprès des touristes !

Cienfuegos est une jolie ville, fondée par un français en 1819 sur une base espagnole. Pas envahie par les touristes, assez tranquille.

Nous apprenons ici la complexité de la vie à la cubaine : où trouver du pain, les boulangeries sont dévalisées très tôt le matin et il faut trouver des revendeurs dans la rue, ou dans un café, avec de la chance… Où trouver du sel ? Du sucre ? Impossible. Pour les fruits et légumes : un marché municipal quasi vide, quelques roulottes dans la rue,

le marché municipal

qui ont 2 ou 3 produits, jamais les mêmes, sauf les trucs très courants (oignons), un autre marché trouvé le lundi avec 3 marchands mais plus qu’un le mardi, pas d’épiceries, sauf quelques magasins d’État réservés aux locaux munis de leurs tickets de distribution alimentaire, et devant lesquels il y a toujours la queue,

pour avoir accès à ces magasins, il faut détenir une carte d’alimentation

si on cherche quelque chose il faut demander dans la rue et on vous répond que peut-être là mais pas sûr, « parce qu’ici c’est compliqué ! » Ils y a aussi de toutes petites échoppes avec 5 ou 10 produits, il faut mettre le nez dedans et voir, demander.

quelques légumes à gauche, boucherie à droite

En général il y a quand même une pancarte avec la liste de ce qu’on peut acheter et le prix. Bref faire ses courses est un casse-tête, et il faut retenir les endroits où l’on trouve un produit pour y revenir…

A Cienfuegos nous commençons à découvrir la vie cubaine, avec les références omniprésentes à Fidel Castro, au Che et à la révolution (achevé en 1959)

les trombines de Fidel Castro et de Che Guevara sont partout, dans une moindre mesure celle de Raul frère de Fidel
« le cavalier sans peur et sans reproche »

Il y a aussi beaucoup de maximes, de pensées, de slogans sur les murs, sur des pancartes dans la rue

« chaque homme est un travailleur et meurt bien s’il meurt en travaillant »… Super….. Jose Marti est un théoricien de la révolution qui fonda le Parti révolutionnaire cubain en 1892, depuis les États Unis. C’est une figure majeure de l’histoire cubaine, sa statue est partout !
« la liberté et son entretien quotidien on la couleur du sang et sont emplis de sacrifices »
plus cool : »la culture est la première chose à défendre »
dans les locaux du Parti : il n’y en a que pour Fidel ! Le Mouvement du 26 juillet a été créé en 1955 par Castro pour réunir les révolutionnaires

mais bon, il n’y a pas que ça, loin de là !

La vie quotidienne dans les transports

le bicitaxi
la mototaxi : ici une Jawa, avec son moteur des années 50 mais améliorée par un ventilo spécial Cuba, frein à disque, phares longue portée, saute-vent ! Et siège de voiture
un transport assez utilisé à Cienfuegos, par les locaux

les achats, les relations avec les touristes : on est quand même souvent sollicités, pour différentes choses : les devises, du savon, les bici-taxi et moto-taxi, des médicaments, un peu de mendicité, les vendeurs de souvenirs dans les endroits les plus touristiques. L’accroche est très souvent : « de quel pays vous êtes – de France » et hop quelques mots de français. Mais certaines personnes sont contentes de parler avec des français, au moins à Cienfuegos et à Trinidad, où l’influence française a été importante.

Avec Yoni nous organisons une virée à La Havane. Les bus c’est assez compliqué, il faut réserver à l’avance, c’est quand même un peu cher, le taxi collectif est la solution la plus pratique pour 4, après avoir réservé un AirB&B, ce service marche très bien ici, sauf que le site internet est bloqué (pourquoi ???), il faut charger un générateur de fausse adresse IP, toute une histoire (pour nous).

Mais il y a plein de logements chez l’habitant (casa particular) entre 10 et 25 € (ou plus) la nuit, très corrects.

Et nous découvrons la Havane, la capitale (2 ,1 millions d’hab) chargée d’une lourde histoire hispano- américano-révolutionnaire ! Un choc d’entrée : dans le centre, un nombre impressionnant d’immeubles tombent littéralement en ruine, alors même que certains étages sont encore habités

Il est sans doute dangereux de passer ou de stationner dessous, mais ce n’est pas interdit !
ici sur le Malecon, l’avenue en bord de mer la plus populaire et la plus touristique !

d’autres juste à coté sont en bon état abritant des commerces ou des restos, d’autres sont juste mal entretenus avec peintures et boiseries défraîchis ou lépreux, ou encore bardés d’échafaudages et d’étais… Tout cela intimement mélangé et vivant.

exemple d’immeuble restauré au premier niveau pour un restau, et bricolé dans les étages pour des appartements, voyez la taille des gens au balcon par rapport à la taille des niveaux ! ils ont donc été dédoublés

L’autre chose frappante, encore plus qu’à Cienfuegos : le musée de l’automobile vivant ! On voit de tout à partir des années 40/50, et de tous les pays. Cela mérite un article à part, mais on a parfois l’impression de se balader dans un décors de film des 50′, d’autant que la circulation est souvent peu dense, comparée à celle de nos villes surchargées !

ce n’est pas une rue piétonne mais la circulation n’est pas chargée !

Autre surprise : il y a des églises partout ! Eh non, les méchants révolutionnaires ne les ont pas détruites !

la catedral, XVIIIème

Certaines parties de la vieille ville ont été bien restaurées avec les fonds internationaux car la vieille ville a été classée par l’Unesco patrimoine de l’humanité

mais du coup on se croirait dans n’importe quelle ville.

Un exemple de bel immeuble représentatif de cette ville :

Nous avons passé trois jours à flâner dans les rues le nez en l’air, à écouter les musiciens dans les bars, à faire les touristes, quoi ! L’impression que nous laisse cette ville est très mitigée, tant de questions se posent quand aux difficultés de vivre des gens, dans un pays dans lequel la révolution socialiste a voulu tout régler sans manifestement y arriver… Circuler à charrette à cheval n’est pas dramatique (la transition énergétique à portée de main!) mais devoir faire la queue devant les magasins dès qu’ils son approvisionnés …

les queues ici sont bien organisées : les gens ne sont pas rangés en ligne mais celui qui arrive demande qui est le dernier arrivé (ultimo ? ), le mémorise et va discuter ou faire autre chose. Ça a l’air de bien fonctionner !

MAIS… ce qui est vrai pour le petit peuple ne l’est pas pour l’hôtellerie et la restauration : ici on ne manque de rien, et on se croirait dans n’importe quel autre pays… par exemple on trouve difficilement du sucre dans le commerce mais il y en a sur les tables dans les cafés !

Et il n’en reste pas moins que Cuba est une dictature, parti unique et pas de presse indépendante !

Trinidad

Les Yoni repartis vers d’autres rivages (peut-être les recroiserons nous aux Bahamas?), nous partons en taxi pour Trinidad, une des plus belles ville de Cuba, qui a tiré sa richesse de la canne à sucre et du travail des esclaves, jusqu’au milieu du XVIIIème. Nous logeons dans l’annexe d’une ancienne maison coloniale, proche du centre. Comme très souvent, le rez-de-chaussée a été transformé en restau ou en magasin de souvenirs,

les grilles plus ou moins ouvragées sont systématiques, même aux balcons des immeubles plus récents style HLM. Parfois on ne rentre même pas dans le magasin, l’achat se fait à travers la grille, la porte-fenêtre fait la même dimension. Mais si l’on peut entrer, on découvre alors d’immenses pièces très hautes, des cours intérieures, sur lesquelles donnent les pièces du haut. Ou parfois en passant dans la rue devant la maison, les immenses fenêtres grandes ouvertes donnent sur le salon

la gamine fait ses devoirs… quasi dans la rue

A Trinidad la plupart des maisons sont à un niveau, seuls les « palais » en ont deux, très rarement plus, et ont souvent été restaurés et transformés en musée.

le museo romantico, qui illustre le faste des palais des très riches au XVIIIème siècle, qui ont importé d’Europe tout ce qui se faisait de plus beau ! Vingt esclaves pour tenir la maison…

le palais vu de la place Jose Marti

Dans le centre historique (classé par l’Unesco) beaucoup des maisons bourgeoises de cette époque appartiennent encore aux descendants, qui les entretiennent d’autant mieux quelles sont devenues des restaus, des magasins de souvenirs, avec en plus des chambres à louer, ce qui était le cas chez nos hôtes Karen & Rique.

Mais la ville au quotidien des habitants de Trinidad est plutôt illustré par cette vue, et les américaines sont hors de portée des petites bourses !

ce petit paysan vient vendre ses quelques productions dans la rue

Et la campagne ? Il y a un beau massif de moyenne montagne à côté de Trinidad, le massif de l’Escambray, mais nous n’avons pas trouvé à y loger pour randonner dedans. Nous nous sommes rabattus sur une sortie à la journée organisée pour groupes. L’intérieur du massif échappe à l’aridité des plaines, en saison sèche actuellement, et les collines sont bien vertes, les cascades coulent, c’est la grande attraction touristique,

Ce que nous avons vu de la forêt n’a pas l’exubérance des forêts tropicales humides du continent, sauf un peu ici en atmosphère confinée de ravin. Cela faisait plus penser aux laurisylves de Madère ou des Canaries.

On a même bien observé le Tocororo, l’oiseau national car de couleurs nationales, bleu blanc rouge ! C’est un trogon, comme le quetzal au Guatemala.

De Cienfuegos, on est partis aussi vers la montagne, en taxi (qui chauffait dans les côtes, il fallait s’arrêter pour laisser refroidir), pour visiter d’autres cascades.

Cela donne également l’occasion de traverser la campagne, les villages

où l’on voit les cultures, l’élevage, les ruches, et où l’on se demande encore une fois pourquoi Cuba n’est pas autosuffisant en nourriture… Beaucoup de traction animale, cheval et un peu de bœufs.

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