Guyane dernière

Malgré le confinement, nous louons une voiture pour nous rendre à la pointe Nord-ouest de la Guyane, à l’embouchure du Maroni. Les villages des amérindiens Kali’na de Awala et Yalimapo sont connus pour leur plage où viennent se reproduire les tortues marines, et leurs habitants se sont ouvert au tourisme avec l’accueil et la vente d’artisanat. Malgré les routes inondées

nous avons le temps d’arpenter la plage le soir, et de trouver une tortue luth en train de recouvrir sa ponte. Émerveillement de pouvoir approcher de si près un animal sauvage !

Une tortue luth adulte peut atteindre 2 m et 400 kg, c’est la plus grande des tortues marines, et vient pondre sa centaine d’œufs à marée haute dans le sable sec, qu’elle creuse avec se nageoires.

Mais, si dans l’eau elle se déplace avec grâce, à terre c’est le calvaire, et elle est totalement vulnérable. La séquence vidéo se situe après qu’elle ait creusé un trou, pondu et rebouché le trou. Quelle idée d’avoir obligé cet animal à pondre dans un environnement qui ne lui convient pas du tout, à s’exposer ainsi à la rapacité de l’homme, qui lui prend ses œufs (elle n’est plus guère chassée directement, mais les chiens du village font aussi pas mal de dégâts sur les pontes) ? Les difficultés à se déplacer sur le sable mou font peine à voir et c’est avec soulagement que nous la voyons enfin rejoindre l’eau et disparaître. Plus tard dans la nuit, nous trouvons une tortue verte, plus petite que la luth mais quand même plus d’un mètre et 100 kg, venue pondre en haut de la plage, qui à cet endroit est réduite à presque rien par les mouvements naturels des bancs de limons amazoniens déposés par l’océan.

calebasse sculptée par les amérindiens

De retour à St Laurent, nous faisons un arrêt à la Charbonnière, sorte de gare piroguière très animée (malgré le confinement), départ des pirogues de fret pour le haut-Maroni et plaque tournante de divers trafics avec le Suriname, juste en face (Albina).

 

Et ce sont les derniers préparatifs pour la traversée vers Carriacou, 620 milles après un dernier mouillage dans une crique (rivière) proche de l’embouchure du Maroni.

mouillage sur le Maroni

La Guyane

Le 9 avril nous levons l’ancre pour joindre Kourou, à 10 milles des îles du Salut. Il y a une petite « marina » sur le fleuve à 1,5 mille de l’embouchure, mais pas de place pour les voiliers de passage. Nous jetons l’ancre pas trop loin du ponton.

Le courant est assez fort à cet endroit et le petit moteur de l’annexe peine pour le remonter. Nous restons juste quelques jours dans cette petite ville sans grand intérêt pour nous, qui vit surtout grâce au centre spatial, d’où partent les vols Ariane, cocoricoooo. Et si sur les îles nous avons pris quelques bonnes pluies, ici nous prenons des déluges ! Impressionnantes les quantités d’eau qu’il peut tomber, alors qu’au Cap vert on en manque tant !

Nous découvrons ici le « sport » national, enfin local : la détention en cage d’un petit passereau chanteur : la picolette

picolette ou pikolet ou Sporophile curio (Oryzoborus angolensis) ici dans une cage luxueuse… mais fermée

pour éventuellement participer à des concours de chant (de l’oiseau, pas du propriétaire).

Un concours nous n’en avons vu que dans la série télé « Guyane », mais partout ici on voit des cages garnies bien exposées à la vue, et à la moindre occasion les propriétaires sortent leur picolette pour qu’elle prenne l’air, et aussi pour se montrer avec, la cage posée sur le toit de la voiture à l’arrêt, quand ils ne les font pas suivre au boulot ! On en verra partout en Guyane, y compris chez les amérindiens, cela fait partie du paysage autant urbain que rural.

On ne peut pas faire notre entrée administrative à Kourou, comme prévu. Bon, le 12, nous reprenons la mer pour St Laurent du Maroni, une nuit de navigation pas très tranquille, entre l’orage et l’attention à porter aux pêcheurs. On doit naviguer un peu loin de la côte, une bonne dizaine de milles, à cause des hauts fonds et de possibles bancs de limons. L’approche de l’embouchure du fleuve Maroni doit être prudente et nous devons attendre quelques heures que la marée remonte assez pour entrer dans le chenal balisé.

A St Laurent, à 16 milles de l’embouchure, nous rejoignons une marina qui a installé des corps morts dans le fleuve, et où nous pourrons laisser le bateau en confiance pendant un périple à terre.

Le temps de s’organiser, de prendre les contacts, de réserver, de se faire vacciner (ici c’est facile et gratuit, 1ère dose de Pfizer), le 24 mai on prend l’avion pour Maripasoula, à près de 250 km de là vers l’intérieur (le trajet par le fleuve est compromis par le niveau très haut du Maroni et l’inondation de certains hébergement étape).

Air Guyane et ses petits avions de 17 places

Voici sur cette carte les différentes destination de ce périple

Maripasoula est un village à la limite du Parc amazonien de Guyane (parc national), et carrefour des populations noirs marrons (issus de la fuite des esclaves du Suriname) et en amont, amérindiens Wayanas. Mais il y a aussi des créoles (métis d’ esclaves affranchis guyanais et des rares colons français ayant survécus aux premières tentatives de colonisation ), des brésiliens, des haïtiens,des chinois, des Hmong, des métros (souvent en poste dans l’armée, la gendarmerie, les administrations)…

une pirogue de fret les grosses pirogues sont dotées de hors bords de plus de 100 cv

Juste en face, au Surinam, sont installés une succession sur pilotis de supermarchés, d’entrepôts divers où on peut tout acheter, dont le matériel pour l’orpaillage clandestin, de boites de nuit/bordels , tenus par des chinois.

Notre hébergeur, chez qui nous installons nos hamacs, est une vedette boni (les premiers noirs marrons à avoir fui le Suriname). Issu du dancehall (variante du reggae), il s’attache maintenant à faire connaître sa culture en mêlant un son moderne et les rythmes et danses traditionnels (Aléké et Awassa), très bien illustrées sur cette vidéo :

Nous parvenons grâce à Rickman à joindre Michel Aloïké un piroguier et guide amérindien, qui est de plus le chef coutumier du village de Taluen où nous voulons aller, 37 km en amont sur le fleuve.

Après avoir remonté le fleuve en pirogue, on nous fait installer dans un carbet

en attendant la fin de l’averse

puis nous visitons le village et ses alentours. Les villages amérindiens de l’intérieur sont peu ouverts au tourisme. Il faut d’ailleurs en principe une autorisation préfectorale pour s’y rendre Nous y sommes tolérés, à condition d’être sous l’invitation du chef coutumier, mais l’impression de ne pas être à notre place est assez forte : en fait il n’y a pas d’espace public, les familles ont leur maison et dépendances, assez espacées, sans espace délimité, et sauf autour du tukushipan, le carbet d’accueil et de cérémonie, flanqué de son terrain de volley,

on a toujours l’impression d’être chez quelqu’un, d’autant que souvent le carbet cuisine est ouvert à tous les vents.

Le chef nous a consacré un peu de temps pour nous guider et nous expliquer différents points de l’histoire du village, de la vie de ses habitants, de ses souhaits pour sa communauté. Il nous présente son ami qui réalise un « ciel de case »

à l’aide de pigments naturels, comme celui qui orne et protège le tukushipan

« Le ciel de case porte sur une multitude de mythes fondateurs Wayana. Il existe environ 25 représentations symboliques illustrées dessus, chacune d’entre elles représentant un mythe ou un conte, dont la transmission orale peut aller jusqu’à une heure : esprits de la Nature, animaux dangereux de la forêt et aquatiques que les Wayana ont réussi à maîtriser, grandes batailles… Le ciel de case a une fonction protectrice d’un côté, au sommet du Tukushipan, le carbet communautaire. De l’autre côté, il témoigne des différentes étapes de l’histoire du peuple. » (citation naturerights.com)

Taluen dispose d’un groupe scolaire conséquent (primaire seulement), d’un bureau de poste, d’un centre de soins. Différents service sociaux viennent tenir permanence de temps en temps. Par contre il n’y a aucun commerce (épicerie), il y a un chinois à 2 km de là sur la rive surinamienne, il faut prendre la pirogue.

le débarquadère du village de Taluen

Bien que cette courte incursion en territoire Wayana ait été très intéressante, nous en garderons une impression de malaise. Par ailleurs nous avons pu lire de nombreux articles sur le mal-être amérindien dans notre société moderne centrée sur la réussite, l’argent, l’ascenseur social… le taux de suicide chez les jeunes est spécialement élevé. L’ouverture au tourisme, à une dose raisonnable et bien menée, est une gageure, alors même que les amérindiens souffrent de leur perte progressive d’identité. Comment conserver leur liens profonds avec la nature quand ils sont tous liés au téléphone portable, au pétrole pour les moteurs des pirogues, débroussailleuses et quads, aux services sociaux aussi présents ici qu’en Lozère ?

Nous repartons après 24 h passées sur place et de Maripasoula nous reprenons l’avion pour Saül, au cœur du département. Ce village de 80 habitants, complètement isolé (ni piste ni route ni fleuve), est sorti de terre lors de la première ruée vers l’or, puis a connu le déclin dans le années 60, et actuellement les habitants s’opposent vigoureusement à toute reprise de cette activité. C’est maintenant une destination naturaliste reconnue pour la qualité de ses forêts, faisant partie du Parc amazonien, et dotée de différentes structures d’accueil.

les jardins luxuriants des carbets du bord, chez Dominique et Jean-Paul

C’est autour de Saül que nous avons fait le plus de balades en forêt, objet de l’article précédent. Mais c’est aussi dans les jardins autour des maisons que l’on voit le plus de faune, en particulier les colibris. Les habitants sont parfois de sacrés numéros, certains métros installés là depuis 30 ans, malgré l’isolement et le coût de la vie (ravitaillement onéreux en avion, et très peu de cultures locales). Les fêtes sont arrosées et baignent dans les décibels, en particulier chez le voisin Lulu, sacré numéro lui aussi ! Ça, et la circulation des quelques quads, font dire à certains que Saül est bruyant, maintenant !

Nous, on a trouvé du calme (surtout après Maripasoula, où la musique est bien plus forte!), enrichissant par les personnes rencontrées et agréable pour l’immersion facile dans la nature.

des sentiers bien aménagés et entretenus

Pour tout dire on a quand même souffert de la chaleur et de l’humidité lors des randonnées, en bottes, et parfois sous la cape de pluie !

tout près de Saül, le fromager élu arbre national de l’année 2015

Allez encore un coup de coucou pour Cayenne, la capitale

l’aéroport de Saül

où nous ne restons que la journée, le temps de revoir cette ville qui ne manque pas de charme, et de faire quelques achats souvenirs.

Cayenne

Nous avons contacté notre ami naturaliste Philippe Gaucher, qui va nous guider dans certains endroits de la montagne de Kaw au Sud-est et nous aide à trouver des hébergements, ce qui dans cette période (covid, peu de tourisme) n’est pas facile.

Philippe nous a fait découvrir une grotte à coq de roche, un oiseau emblématique de la forêt, qui y niche en compagnie de chauve souris et autres araignées cavernicoles

Un coq de roche (Rupicola rupicola) nous avons fini par en apercevoir un. Les mâles de ces oiseaux du sous-bois sont très colorés, contrairement aux autres espèces de ces milieux, et paradent dans certains endroits recevant les rayons du soleil.

coq de roche mâle

Une petite visite au marais de Kaw

une rencontre avec l’une des grenouilles colorées du sous bois

un dendrobate

et nous sommes de retour au bateau à St Laurent, à temps pour stopper la moisissure qui s’installe ça et là, par défaut d’aération suffisante.

Puis c’est l’annonce du reconfinement covid à partir du 14 mai ! Pour nous c’est l’abandon de projets de visites autour de St Laurent, en particulier sur la côte pour assister à la ponte des tortues. Nous pouvons nous déplacer en bateau (à priori) et l’avons testé en remontant le Maroni sans que les gendarmes, très actifs sur le plan d’eau pour repousser toutes les pirogues qui passent sans arrêt du Suriname en France, ne nous disent rien. A terre nous sommes bloqués sauf achats.

Mais de toutes façons la saison avance et nous prenons nos dispositions pour remonter vers Grenade et les Grenadines, pour sortir le bateau de l’eau sur un chantier à Carriacou, pour donner un coup sur la coque (Carriacou appartient à l’État de Grenade, tout en faisant partie de l’archipel des Grenadines. L’autre état des Grenadines, au Nord, se nomme « St Vincent et les Grenadines »)

Balades en forêt amazonienne

Le département est couvert à 80 % de forêt tropicale humide, non perturbée pour l’essentiel. Pas « primaire » car les amérindiens l’ont toujours pratiquée et utilisée, mais à très faible degré. Actuellement il n’y a quasiment aucune route à l’intérieur du département, la population se concentre sur le littoral et un peu le long des fleuves, avec la pirogue comme seul moyen de déplacement. Et effectivement ce qui est frappant quand on se déplace en avion à basse altitude (sur les lignes intérieures), c’est la continuité du manteau forestier : immense, à perte de vue, et quand on sait qu’il s’étend au delà de nos frontières, on se sent petit.

le couvert forestier évoque le brocoli

Quasiment pas de trouée, sauf le long des fleuves où l’on découvre des défrichements à but agricole (les abattis) ou des chantiers d’orpaillage (autorisés ou clandestins)

chantier d’orpaillage

Cette continuité a un autre effet : quand on est en forêt, on ne voit rien d’autre, les points de vue sont très rares, ils doivent combiner un relief particulier et une trouée due à un chablis (= chute d’un ou plusieurs arbres, créant une clairière)

On peut aussi voir la forêt par le fleuve, mais sauf implantation humaine, on a en face de nous un mur végétal, pas vraiment accueillant !

Pour entrer dans la forêt, on emprunte des sentiers tracés et entretenus, et hormis sur la seule largeur de ce sentier, on peut se sentir en forêt « vierge », ce qui n’est jamais le cas en Europe occidentale. Et l’abondance végétale combinée à notre connaissance de la situation fait qu’on se sent petite fourmi !

Cette abondance végétale est d’ailleurs très bien répartie sur la hauteur, la canopée avec des grands arbres de différentes hauteurs captant une bonne partie de la lumière, puis les arbres secondaires et les jeunes arbres qui cherchent à faire leur place captent leur part, plus bas les arbustes, arbrisseaux et les jeunes pousses se disputent le reste, au final il n’y a que 2 % de la lumière qui arrive au sol ! Et le sous bois est de ce fait très peu dense, rien à voir avec par exemple avec un sous bois dense et impénétrable de buis sous pinède !

On sait pas les présentations que la forêt de Guyane recèle une biodiversité extraordinaire : pour les arbres forestiers plus de 1000 espèces, contre environ 35 en métropole (en ne comptant que les autochtones). On peut trouver potentiellement jusqu’à 200 espèces différentes sur un hectare, contre une dizaine chez nous en forêt riche. Mais c’est une donnée difficile à appréhender. On ne voit que le pied des arbres, avec des enracinements particuliers, des écorces reconnaissables, parfois leurs fruits à terre, ou leurs feuilles, mais il manque les fleurs, l’époque de floraison pour pouvoir les reconnaître.

Les fruits et graines trouvées à terre :

On se contente donc d’admirer, de s’immerger, de ressentir. Certains arbres sont énormes (1 à 1,50 m de diamètre), montent très haut (50 à 60 m), tout droit. Les photos d’arbres sont difficiles à réaliser. Une petite vidéo est plus parlante !

Il y a aussi les lianes, qui s’enroulent, montent, descendent, enchevêtrent, étranglent !

Et les épiphytes, plantes qui poussent sur les autres, mais surtout dans la canopée (dont un certain nombre d’orchidées). On ne les voit que très peu, sauf sur des arbre isolés.
Tout ça vit et meurt à un rythme assez rapide : dès que les arbres atteignent une certaine dimension, ce qui sous ce climat chaud et humide vient assez vite, les termites

une termitière

et les champignons les colonisent, les affaiblissent, et à l’occasion d’une bonne pluie qui surcharge considérablement leur feuillage, un coup de vent les déséquilibre et fait tomber les grosses branches, ou l’arbre entier, entraînant parfois les voisins liés par des lianes traîtresses ! C’est le phénomène de chablis, qui crée ainsi une clairière dans laquelle la lumière permet aux plantules et jeunes pousses de se précipiter vers les cimes, avec l’abri latéral des autres arbres. La forêt se régénère ainsi, à un rythme moyen de 1 % de la surface par an.

en fait les sols sont peu profonds, et souvent gorgés d’eau, ce qui ne favorise pas un enracinement très costaud
gros tronc de chablis, la végétation reprend le dessus
clairière due à un chablis

Ces chutes de tout ou partie d’arbres sont d’ailleurs un des principaux dangers en forêt. Lors de nos sorties nous en avons entendu plusieurs fois, de ces gros craquements inquiétants ! Et quand un chablis impacte un sentier, il faut parfois faire un bon détour, au risque de se perdre (2ème risque important en forêt!).

Et à part les arbres, que voit-on ? Et bien malgré cette soit-disant biodiversité extraordinaire, on ne voit presque aucun animal. On entend les oiseaux, tout là haut, bien cachés par les milliards de feuilles, on entend des grenouilles, sans les voir, en tout cas si elles ne sautent pas devant nos pieds !

tiens tu la vois, là ?

Au niveau du sol, tout est camouflé, et sauf pour certains papillons, les couleurs vives sont réservées aux cimes !
Nous avons quand même eu la chance de tomber sur un groupe d’atèles, singes de taille moyenne vus aux jumelles, sur un groupe de hurleurs de Guyane, juste au dessus de nos têtes, un des singes les plus démonstratifs par leurs hurlement sinistres, et sur des saïmiris, petits singes aux mains jaune d’or.

Hurleur de Guyane

Les animaux les plus nombreux de la forêt sont les fourmis et les termites, sans compter les guêpes, mouches moustiques et divers trucs qui peuvent te piquer, mordre, sucer, parasiter, faire sortir des boutons, plaques rouges, infections, maladies… Mais on a survécu !

Ces étonnantes fourmis-manioc découpent des feuilles et les transportent parfois de très loin, en créant de véritables routes, pour alimenter leurs champignonnières, dont elles se nourrissent.
Pas vu de serpent* ni de mygale ni de jaguar, mais nos incursions dans la forêt ont été très courtes, on aurait encore tant à découvrir !

*Si ! ce magnifique Philodryas viridissima surpris à traverser la piste alors qu’il devrait être dans les branchages, bien camouflé dans les feuilles vertes ! (merci à l’ami Philippe Gaucher pour l’identification !)

La Transat !

Nous dirons peu de choses de Santiago, la dernière île du Cap vert visitée. Nous avons pu y retrouver Guillaume, un copain lozérien établi à Praia, la capitale, et venu nous voir à notre mouillage à Tarafal.

Nous avons aussi rencontré ici Jone et Sandro qui nous ont aidés pour faire le plein d’eau et nous ont amenés à Praia faire les formalités de sortie. Du coup on a traversé l’île pour nous rendre compte qu’elle était, comme les autres, digne d’intérêt par ses paysages assez montagneux, ses villages, ses côtes… mais nous avons vraiment envie de changer, maintenant !
Donc après force avitaillement en vivres et en eau, nous levons l’ancre le 23 mars direction la Guyane. La météo annonce des alizés de l’ordre de 20 nœuds, et c’est ce que nous aurons tout le long, sans trop de variations, pas de grains importants avec coup de vent en pleine nuit, pas de mauvaise rencontre (très peu de bateaux sur cet océan…) pas de bonne non plus (baleines dauphins) par contre presque tout le long des sargasses en plaques ou en longues traînées

une algue brune dont certaines espèces sont exclusivement flottantes

On a quand même trouvé ça un peu long car la mer, une fois de plus (!) était pénible, genre il faut se cramponner tout le temps !
En approchant des côtes, bonne surprise, le courant des Guyanes qui vient de l’Amazonie nous pousse vers notre destination et les dernières 15 heures nous voguons à une vitesse de 6,5, puis 7, puis 8 nœuds alors que notre moyenne aura été de 5,5 pendant toute la traversée ! Ce qui nous a permis d’aborder les îles du Salut vers 15 h plutôt qu’à la nuit comme calculé.

les îles du Salut

Au final 1889 milles parcourus en 14 jours et quelques heures, pour découvrir 3 îles couvertes de cocotiers, nous jetons d’ailleurs l’ancre dans la baie des cocotiers sur l’île royale, qui rappelons le, a servi de bagne à la France entre 1852 et 1946. Ses vestiges, plus ou moins entretenus, se visitent, tous les jours plusieurs bateaux viennent de Kourou. Dans certaines parties (notamment sur l’île St Joseph) la forêt est en train de recouvrir les vestiges

et la visite de ces lieux de souffrance fait forte l’impression.

l’île du diable, sur laquelle étaient isolés les prisonniers politiques, comme Dreyfus

Mais ces îles ne sont séparées de la côte que de quelques kilomètres donc on y trouve une partie de la faune et de la flore de Guyane, à notre grand plaisir !

un agouti, gros rongeur très répandu ici
jeune singe capucin

L’île de feu

Ah, en fait, l’île la plus impressionnante est peut-être Fogo ! L’île volcan, toute ronde, un énorme volcan, 2829 m d’altitude. En haut, un immense cratère dont le fond est plat, habité et cultivé.

28 éruptions en 500 ans dont la dernière en 2014-2015. Elle a duré 77 jours et, si elle n’a pas fait de victimes, les coulées de lave ont détruit une bonne partie des villages, des cultures, des infrastructures.

le village de Portela, dans la caldeira (cratère)

Le spectacle de cette coulée de lave, maintenant figée en plein mouvement mais dont on imagine très bien la progression inexorable et destructrice, est poignant.

la lave s’est arrêtée juste avant de détruire complètement cette maison. En arrière une reconstruction en moellon de ciment

Les habitants ont été évacués et le gouvernement ne voulait pas qu’ils se réinstallent dans cette zone si exposée. Mais c’est sans compter sur la résilience Cap-verdienne : sur les 1300 déplacés plusieurs centaines sont revenus, ont creusé à la pioche la lave à peine refroidie pour dégager leur maison ou reconstruire par dessus, sur le modèle rond traditionnel ou de façon plus classique.

ça évoque les yourtes ! Mais c’est bâti en pierre de lave et le toit est maintenant en torchis ou ciment sur une charpente. Celle-ci a été épargnée de justesse par le torrent de lave, juste derrière. Au premier plant, le sol « normal », en scories, des éruptions précédentes.

La pouzouolane de la caldeira permet la culture de la vigne qui produit un vin réputé localement (et cher…) ainsi que quelques arbres fruitiers (petites pommes, figues…), et le tourisme est une ressource importante.

pas besoin de désherbant !

Bon là, covid oblige, on était les seuls sur la caldeira et José chez qui nous avons logé, se désespérait comme beaucoup d’autres de l’absence totale de touristes. Sans aide gouvernementales, la survie est précaire.

le gîte de José est construit de ses mains en pierre de lave, et décoré de ses sculptures.

L’école détruite est provisoirement installée dans une maison épargnée, et au matin on assiste au spectacle étonnant de ces enfants surgissant de partout, petites taches colorées sur le noir de la lave.

Spectacle faussement rassurant de la vie qui continue, dans cet endroit où tout le monde sait que la catastrophe se reproduira ! Au final cela nous laisse une forte impression mêlant effroi rétrospectif et admiration envers ces habitants de la Caldeira, acharnés à survivre dans cet environnement à la beauté brutale, mais qui peut devenir si hostile.

L’autre découverte sur cette île est la culture du café, ici en mélange avec les bananiers voire d’autres plantes, dans la zone des brouillards entre 500 et 700 m d’altitude au Nord-est de l’île. On est juste au début de la récolte, les fruits rouge sombre sont encore sur les plants, mais certaines terrasses accueillent déjà les grains pour les sécher au soleil.



Revenus à la route au pied des parcelles, nous trouvons une classe d’une école du village de la côte, en sortie scolaire, en train de danser et chanter sur le parking. Nous nous asseyons sur le muret, au spectacle. Les enseignants leur font chanter Bom dia (bonjour), les enfants sont ravis d’avoir un public. Et nous aussi !

Mais les bonnes choses ont une fin et le transport scolaire arrive : un aluguer ou hiace « normal » équipé 15 places (chez nous le même modèle est un 9 places), mais… toute la classe va y tenir, 35 bambins, plus 6 adultes enseignants et 2 chauffeurs !

Nous prenons 3 adultes dans notre voiture de location pour les redescendre à l’école.

Hormis la zone des caféiers, le reste de l’île a souvent des allures de savane, de plus nous sommes en saison sèche. Mais en bas du volcan , les pentes sont raisonnables et on trouve souvent des cultures, maïs, haricots, et un peu d’élevage.

Et on a la surprise de voir çà et là des baobabs, dont certains très gros.

Et dans cet environnement :

le martin chasseur à tête grise, enfin photographié grâce au nouvel appareil photo. Quand il s’envole il découvre de larges parties du même bleu éclatant que chez nos martin-pêcheurs.

Fogo et Brava ont des relations étroites avec l’est des États-Unis où une diaspora Cap-verdienne est installée, à l’origine en s’embarquant sur des baleiniers américains pour fuir la famine.

Pas mal de grosses motos : symboles du rêve américain ?

Sao Philipe, la capitale, recèle de belles maisons coloniales. Nous avons du y rester pour faire le test covid nécessaire pour rentrer sur Brava.

Brava où nous avions laissé Nocciolino, bien ancré et tenu par une ligne à terre dans le petit port de Furna, sous la garde de Tcha. C’est la plus petite des îles habitées, 8 km environ de diamètre, la moins peuplée et la moins fréquentée par les touristes. Nous y avons passé quelques journées très agréables, avec quelques belles balades et des rencontres sympathiques. A la saison des pluies, en automne, c’est « l’île verte », mais en cette saison ne ressortent que les fleurs d’hibiscus, dans les jardins ou en haie dans la campagne.

Furna est le seul port de l’île, et accueille le ferry. C’est un village de pêcheurs, mais qu’arrive un petit cargo et tous cherchent à se faire embaucher pour la main d’œuvre. Les seuls magasins, assez nombreux cependant, sont de toutes petites épiceries, sans enseigne ni vitrine.

Le 16 mars nous quittons l’île pour joindre notre dernière étape au Cap Vert, Santiago. Un peu plus tard, nous passons les 20 000 milles ( ~37 000 km ) depuis le départ du voyage.

20 000 milles, vitesse 4.7 nœuds, à 8.55 milles du départ ce matin, cap 107.2 degrés

Champagne ! Ah, on n’en a pas, et il n’est que 8h30… café, alors !

Déjà mars, toujours au Cap Vert !

Et pas un mot sur Santo Antao, la plus impressionnante des îles de l’archipel. Le 12 janvier, Nina la fille de Babeth est venue nous rejoindre pour une quinzaine de jours. Ensemble, nous avons pris le ferry de Mindelo pour Santo Antao, car y aller en voilier est trop problématique.

Tous ceux qui y sont allé nous ont averti : les randos sont très raides et longues, et craignant pour nos articulations, nous avons loué une voiture pour sillonner l’île et faire des balades plus courtes.

A part son relief vertigineux, c’est la production agricole qui est impressionnante : certaines vallées reçoivent assez d’eau pour pouvoir cultiver tout ce qu’on veut, à condition d’avoir au préalable aménagé des kilomètres de terrasses sur les pentes abruptes.

Toute parcelle à peu près accessible et susceptible d’être irriguée (eau conservée dans des bassins et redistribuée par gravité dans des rigoles, et maintenant de plus en plus au goutte à goutte par des tuyaux) est exploitée, moyennant quoi l’île est pourvoyeuse de légumes (pois, choux, tomate, patate douce, igname, courges…) et de fruits (papaye, banane, …) pour une partie du Cap Vert. Et j’allais oublier la canne à sucre, pour le rhum (grog) sur une proportion non négligeable de la surface.

canne à sucre et bananiers

Puis Babeth repart en France pour trois semaines, je reste sur le bateau, au mouillage à Mindelo.

au mouillage dans la grande baie de Mindelo

Mes envies de navigations vers d’autres coins sont très limitées par une météo peu propice et des conditions de mer et de vent toujours exacerbées entre les îles. Ma seule sortie : passer sur le coté ouest de Santo Antao pour un mouillage calme devant le village de Tarafal (il y a beaucoup de villages de ce nom dont l’origine est le tamaris), pour changer d’air et nettoyer un peu la coque dans une eau plus propre que celle de Mindelo. Mais le retour a été raide, contre le courant entre les îles et un vent « de couloir » de 35 à 40 nœuds !

D’autre part, les échanges avec les équipages d’autres bateaux sont très riches et nous enracinent dans cette petite communauté très particulière et très variée que sont les voyageurs en voilier.

La rencontre la plus originale est l’arrivée ici de Tara, célèbre goélette française de 36 m dédiée à la recherche scientifique en écologie marine. Mindelo était pour eux l’escale technique entre Lorient et Punta Arenas au sud du Chili. Un soir la moitié de l’équipage de Tara s’est pointée sur un voilier ami où l’on finissait un apéro de départ, vers 1 h du mat, ah ben oui les bars fermaient en ville ! Et nous avons bien discuté.

A Mindelo nous rencontrons bien sûr beaucoup de cap-verdiens, dont une partie parle français, mais en tant que quasi seuls touristes à cause du covid, les équipages des voiliers de passage sont très sollicités pour acheter poisson, légumes, ou services en tous genres, ou de la mendicité.

dans la rue, fabrication de bracelets pour Leïla et Célestin

Nous avons par exemple pu trouver grâce à un de ces démarcheurs un artisan pour refabriquer certaines pièces en inox pour le bateau.

Il y a aussi une communauté d’africains de l’ouest spécialisée dans la confection. Toutes les couleurs de l’Afrique !

Le 23 février, Babeth est de retour (avec plein de cadeaux… genre saucisse sèche, fromage d’Auvergne !), et, enfin, l’appareil photo laborieusement commandé d’ici et impossible à recevoir autrement.

Le 2 mars, nous partons pour les îles du sud, en commençant par Brava, la plus petite et la moins fréquentée de l’archipel. Test covid, pleins d’eau et gazole, et 24 heures de traversée.

gecko du Cap Vert

De Sao Nicolau à Mindelo

Après une escale au mouillage près du tout petit village de pêcheurs de Carriçal, nous joignons Tarrafal, seul port de Sao Nicolau et plus grosse ville de l’île. Un gros village, en fait. Le port n’est qu’un quai pour un seul bateau de commerce ou le ferry, et un petit quai pour les pêcheurs, protégé par un petit môle. Tous les bateaux, barques des pêcheurs comme les voiliers, sont au mouillage le long de la grande plage. Et tous les voiliers copains sont là !

un petit caboteur apporte différentes marchandises qui seront livrées dans les villages par les pick-up

Comme à Palmeira, le poisson frais est traité directement sur le quai

les thons, bonites, coryphènes… sont pêchés à la ligne.

mais en plus ici, il y a une conserverie réputée, qui traite essentiellement du thon.

Avec ses 1300 m d’altitude, l’île a son coté aride et son coté humide, lequel permet de nombreuses cultures, surtout vivrières : haricots et pois, courges, manioc, maïs, une peu de canne à sucre, de tabac ou de café, et papayes, bananes et avocats… une sorte de permaculture pratiquée depuis toujours, tout à la main, avec des ânes pour le transport.

on croit que tout est en friche ! La couverture végétale maintient l’humidité du sol.
Le maïs une fois récolté sert de tuteur aux haricots.

Nous restons assez longtemps à Tarrafal pour prendre nos repères, reconnaître les gens et être reconnus, comme acheteurs de poissons ou autre service,

juste avant Noël, la queue pour se procurer des œufs chez le chinois, pour les pâtisseries

chaque fois qu’on va en ville, les gamins s’imposent gardiens d’annexes, pour quelques pièces. Mais on préfère leur laisser de la nourriture achetée pour l’occasion
il y très souvent une queue devant la banque

Quelques randonnées nous font aussi découvrir l’intérieur

un itinéraire particulièrement scabreux, mais… entièrement pavé !

Peu après le départ sur l’une d’elles, un coup de fil des copains nous apprend que sous l’effet des rafales (à Tarafal …) Nocciolino s’est fait la belle et partait vers le Brésil !!! Heureusement Aline et Marc, aidés de Thierry, l’ont vu à temps et ils ont bien réagit, et quand on s’est rapatrié une heure plus tard, tout était revenu en ordre. Après avoir sécurisé le mouillage, en rajoutant 30 ou 40 m de câblot aux 50 m de chaîne, on a « fêté » ça au resto ! Mais la nuit tombée, de nouvelles et fortes rafales (40 nœuds) nous ont fait de nouveau décrocher ! (la raison supposée : une trop fine couche de sable…? et là, même la longueur du mouillage n’y fait rien). Cette fois on a re-mouillé dans un autre coin, d’ailleurs plus près du port.

Nous quittons Tarrafal le matin du 24 décembre, pour longer les îlots de Razo et Branco, et joindre l’île inhabitée de Santa Luzia. Razo est connue pour ses colonies d’oiseaux, mais c’est l’hiver et les fous bruns ainsi que les paille-en-queue (grand phaéton) sont peu nombreux. Santa Luzia n’est fréquentée que par les pêcheurs de passage, qui viennent y bivouaquer, et par les voiliers. Mais toute notre bande et partie à Mindelo fêter Noël, et quand nous arrivons en fin d’aprème il n’y en a qu’un, qui repartira le lendemain matin, laissant l’immense plage à notre disposition.

Très très tranquille, ce mouillage. Et pour le soir de Noël nous avons mangé une carangue pêchée quelques heures plus tôt !

Puis cap sur la ville : Mindelo, sur l’île de Sao Vicente. La grosse ville (70 000 hab), avec la seule marina du Cap Vert, et souvent une étape sur la route des Antilles ; il y règne donc une atmosphère de voyage, de derniers préparatifs, de réparations de dernière minute, de discussions sur la météo, tout ça assez festif. Nous retrouvons les amis du début du mois, mais au fur à mesure des arrivées s’y joignent de nouveaux équipages.

La marina est au centre ville, qui est en général assez animé. Il y a un grand marché au poisson, autour duquel se presse une foule compacte le matin, au moment du retour des barques de pêcheurs.

mais on peut aussi acheter le poisson dans la rue. Le thon découpé : 5 €/kg, la bonite entière 2 €/kg – la monnaie locale c’est l’escudo, qui vaut à peu près 1 centime.

Il y a aussi 2 marchés couverts pour les fruits et légumes, qui, nous a-t-on dit, viennent quasiment tous de Santo Antau, l’île voisine beaucoup plus humide. Et parallèlement aux marchés, ces produits se retrouvent à la vente dans la rue par de tous petits détaillants.

Il y a quelques bars où les musiciens se retrouvent pour des jams auxquelles peuvent se joindre Marc et sa trompette, qui nous a ainsi ouvert les portes pour rencontrer les cap-verdiens.

C’est d’ailleurs là que nous avons passé une partie de la nuit du 31 décembre, jusqu’à la fermeture covid à minuit. Nous avons fini en fête improvisée entre les équipages français sur le ponton-bar de la marina.

 

Le Cap Vert

Et ça y est ! On a passé le Tropique du Cancer, et dans ses alentours les 19 000 milles depuis le départ ! (35 200 km). Ouais…, un peu fiers quand même ! 6 jours et demi, du vent tout le temps, essentiellement de travers, mais une mer croisée peu confortable, sauf durant 48 heures au milieu. On en a profité pour monter le régulateur d’allure, qui actionne la barre avec l’énergie de l’eau, car le pilote électrique consomme pas mal surtout dans une mer formée ; et comme on fait une route presque Sud, pendant la partie de la journée la plus ensoleillée, les panneaux sont à l’ombre de la voile, on n’arrive pas à recharger les batteries, c’est malin !

Pendant cette accalmie, une troupe d’une vingtaine de Stenos rostrés, de la famille des dauphins, vient jouer avec nous ! Spectacle assuré à l’étrave !

Puis le vent s’est remis à souffler, la mer à gronder, et la navigation à redevenir assez inconfortable ; Au petit matin du dernier jour, on a évité de justesse un petit cargo dont on croisait la route ; nous avait-il vu ? Si l’on n’avait pas fait une manœuvre ça aurait été chaud !

A l’approche de Sal on avait du 25-30 nœuds derrière, un petit bout de génois nous poussait à 6 nœuds. Puis on est petit à petit passés sous le vent de l’île, jusqu’au mouillage complètement protégé dans la baie de Modeira, ancre mouillée à 2h 45 du matin, vendredi 27 octobre ; le petit coup de prune habituel à l’arrivée de chaque traversée (et une pensée reconnaissante pour Bertrand!) et au lit !

772 milles au compteur, tout s’est bien passé, pas de casse pas de blessure (quand la mer est forte, le plus gros risque si l’on ne va pas sur le pont, s’est de se faire mal en se déplaçant à l’intérieur), aucun poisson pêché, alors que tous les autres n’ont pas arrêté : daurades coryphènes, bonites… là on est vraiment pas bons !!!

Dans la matinée, on se déplace pour mouiller dans le petit port de Palmeira, le seul de l’île.

Il faut faire les formalités administratives d’entrée, et le contrôle sanitaire, qui s’est résumé à la prise de température et au contrôle du test covid effectué aux Canaries. On a eu de la chance, en 2 heures c’était plié ! Ceux qui arrivent sans test peuvent attendre 4 jours le résultat, et s’il y a le WE au milieu…

Enfin, voilà, on est en Afrique (à la latitude de Dakar à peu près), contraste saisissant avec les Canaries, où l’on et toujours en Europe, à tous points de vue. Ici les gens sont quasi tous noirs, avec beaucoup de métissage, il y a aussi des immigrés d’Afrique de l’Ouest. Les vêtements, les coiffures, la nonchalance (« no stress » semble être devenue la devise du Cap Vert) font penser à l’Afrique.

Le pays est visiblement pauvre, et c’est sans doute plus marqué sur Sal, une île plate sans eau (il y a une usine de désalinisation), donc sans cultures. Routes non goudronnées, tout le monde n’a pas de moyen de locomotion, déplacements à pied ou avec des taxi-brousse, petits fourgons qui ne partent que quand 14 passagers se sont tassés dedans. Mais les gens sont très gentils et souriants, prêts à rendre service. De plus beaucoup parlent français ; heureusement car nous et le portugais ou le créole local…!

La pêche avec de petites barques est d’autant plus importante que l’agriculture est indigente. Tous les matins les pêcheurs débarquent leurs prises sur le quai et trient, préparent et vendent directement aux particuliers, aux restaurateurs, et une partie part dans le reste de l’île.

Covid oblige, il n’y a quasiment pas de touristes, à part ceux qui viennent en voilier. Nous sommes une douzaine de bateaux au mouillage à l’abri du môle, dont beaucoup d’équipages français. Ambiance super sympa, on se retrouve souvent dans les bars ou petits restos bon marché (3,50 € le plat du jour !) à échanger expériences et infos pour la suite du voyage. Et on fait marcher le commerce local, qui tire un peu la langue.

L’île est toute petite, 20 x 10 km environ, plate sauf quelques anciens petits volcans ; ambiance savane,

C’est désertique mais… les petits points noirs sont des vaches !

avec faune adaptée : pour les oiseaux : sirli du désert, courvite isabelle, moinelette à front blanc, ammomane élégante, pour le plaisir de nos yeux, enfin des espèces originales ! Au port, pas de goélands quand les petits pêcheurs rentrent et préparent le poisson sur le quai, mais des aigrettes des récifs ou garzette. Un couple de balbuzards pêcheurs circule par là, se perchant même à la cime d’un mât !

Le sel a fait en son temps la richesse de l’île. Il reste 2 salines dont une très originale dans un cratère, dont le fond est sous le niveau de la mer.

L’exploitation continue mais ça n’a pas l’air très intensif, peut être parce que c’est l’hiver ?

Hiver… façon de parler ! Température quasi constante autour de 23 – 25 °C, l’alizé souffle en permanence pour empêcher le soleil de chauffer trop fort dans la journée.

Voilà pour la première île. Ce soir nous partons vers l’Ouest pour Sao Nicolau, avant un coup de mauvaise mer qui descend du Nord. Le plein d’eau avec Jai, et on est parés.

 

Départ pour le Cap Vert !

Départ imminent pour le Cap Vert. Et oui, après avoir tourné en rond un bon moment sur les iles de l’ouest de l’archipel, après un retour avorté de Babeth en France, vu la mise en place dans ce pays du couvre feu puis du reconfinement, et vu que les frontières du cap vert sont ouvertes, on y va.

Evidemment c’est au dernier moment qu’on veut mettre le blog à jour, donc c’est fait mais mal fait…

Traversée de 760 milles, météo nous annonçant des vents plutot faibles sur une partie du trajet, l’alizé n’est pas encore bien établi; ça devrait nous prendre 6 à 8 jours. Les derniers préparatifs, dont la récupération du test Covid, et on largue les amarres.

à plus tard !